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11/11/2024
Cet automne, avant que de refermer ses portes pour plusieurs années, le Centre Pompidou nous convie à une « sur-réelle » déambulation. Risquons-y-nous !
Surréalisme : « automatisme psychique pur par lequel on se propose d'exprimer le fonctionnement réel de la pensée, en l'absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale ». Tels sont les mots d'André Breton, dont la voix reconstituée par l'IRCAM, résonne entre les murs du :
Centre Pompidou avec l'exposition « Surréalisme »
jusqu'au 13 janvier 2025
Le spectateur y pénètre par un couloir noir, hypnotique, débouchant sur une salle circulaire, coeur battant de l'exposition. Là y est en effet présenté le manuscrit du premier « Manifeste du surréalisme » d'André Breton publié en 1924, il y a cent ans (prêt exceptionnel de la BnF).
A partir de ce point central, le parcours se déroule en spirale, parcours destiné à régénérer notre regard sur ce mouvement révolutionnaire puisant ses racines au sein de DADA (né durant la Première Guerre mondiale) et officiellement dissout en 1969 (au-delà donc de la mort d'André Breton en 1966).
Peintures, photographies, films et documents y évoquent les idées, les démarches « révolutionnaires » (politiques également), les principes poétiques (l'artiste médium, le rêve, la forêt…) et les figures littéraires inspirantes (Rimbaud, Lautréamont, Cravan…). Tout cela en compagnie d'artistes tels Miro, Magritte, Ernst, Dali, Buñuel (les films « un chien andalou » avec Dali, « l’âge d'or »).
Et le parcours déborde, nous emporte hors des frontières de l'Europe : au Japon, au Mexique, au Chili avec Roberto Matta…
Et puis des femmes, toutes ces femmes : Dora Maar, Claude Cahun, Léonora Carrington, Dorothea Tanning…
Un centenaire dignement, magnifiquement célébré !
Retrouvons les Hommes avec
« Caillebotte. Peindre les hommes » Musée d'Orsay
jusqu'au 19 janvier 2025
Nous connaissions Gustave Caillebotte (1848-1894), collectionneur, généreux légataire à l'État français, mécène, tout aussi généreux pour ses amis impressionnistes, mais aussi bien sûr peintres. Viennent à l'esprit ses magnifiques « Raboteurs de parquet », l'atmosphérique « Rue de Paris, temps de pluie »...
L'exposition actuelle en affine l'angle de présentation, peut-être à l'aune de deux acquisitions récentes présentées ici :
« Jeune homme à la fenêtre » par le Getty Museum
« Partie de bateau » par le musée d'Orsay (passionné de nautisme fût-il !)
Il est vrai que si ses amis, Renoir, Degas… ont plus volontiers prisé le modèle féminin, Caillebotte porte plutôt son regard sur l'homme, l'homme moderne s'entend : en milieu urbain, dans ses loisirs, comme dans son intimité.
Sur ce thème choisi, on remarquera là aussi, l'influence de ses amis impressionnistes, d’une formation académique à un style plus libre.
Cette exposition se révèle alors une belle opportunité à redécouvrir cet artiste, cet homme aux multiples, trop peut-être, facettes.
Attardons-nous au Musée d'Orsay, pour
« Harriet Backer (1845-1932) La musique des couleurs »
jusqu'au 12 janvier 2025
Leïla Jarbouai, une des commissaires de l'exposition, nous confie d'emblée : « En dehors de la Norvège, son pays natal, où elle est considérée comme une peintre nationale, personne ne connaît Harriet Backer ».
Voilà donc ici chose faite.
Formée à Oslo auprès d'une éminente figure du romantisme tardif, elle maturera son art en suivant sa soeur Agathe, célèbre pianiste et compositrice dans toutes les capitales européennes. Séjournant plus longuement à Paris dans les années 1880, elle recevra d'abord l'enseignement de l'académique Jean-Léon Gérôme tout en se frottant aux tendances du moment, dans l'impressionnisme bien sûr.
Dans ses toiles, dont beaucoup de scènes d'intérieurs, elle conjugue naturalisme et innovations avec de riches variations lumineuses colorées, avec une touche rapide, vivante, vibrante...vibrante comme « La musique des couleurs ».
La Seine franchie, pénétrons au Musée de l'Orangerie, pour voir, revoir sans jamais se lasser, Klee, Giacometti, Matisse, Picasso..., choix d'un collectionneur et galériste assez peu connu :
« Heinz Berggruen, un marchand et sa collection »
jusqu'au 27 janvier 2025
Un écho bien sûr à une collection présente en ces lieux : la collection Walter-Guillaume.
Ne quittons pas ces lieux sans un regard sur un autre « écho », un écho contemporain aux Nymphéas de Claude Monet, réalisé par l'artiste peintre « Amélie Bertrand. Hyper nuit » : coloré et réjouissant !
Restons dans ce « tempo » haut en couleurs avec
« Pop Forever, Tom Wesselmann &... »
Fondation Louis Vuitton, jusqu'au 24 fevrier 2025
On y célèbre ici le Pop Art (popular art des années 1960 en Angleterre puis aux États-Unis) et plus particulièrement une de ses figures emblématiques, Tom Wesselmann (1931-2004). S'y décline un riche panorama de ses oeuvres : de ses premiers collages à ses vastes toiles hyperréalistes jusqu'à ses « Sunset Nude » (Nu au coucher de soleil), très « matissiens » dans les années 2000.
Mais l'ambition de l'exposition dépasse sa seule personne. Avec ses collages principalement, elle tend en effet avec audace, à le relier aux figures dadaïstes du passé comme Hannah Höch. Le lien avec ses contemporains (Andy Warhol, Claes Oldenburg, Meret Oppenheim…) s'établit bien naturellement. Quant à son futur, notre contemporain, il est représenté par des artistes partageant cette sensibilité « Pop », tels Ai Weiwei ou Yayoi Kusama.
Une très originale prise de vue de l'art des XXème et XXIème siècles !
Du Pop Art à l'Arte Povera, le saut est audacieux ! Tentons-le en nous rendant à la :
Bourse de Commerce - Pinault Collection
« Arte Povera », jusqu'au 20 janvier 2025
Plus qu'un mouvement aux contours définis, nous découvrons une association d'amis, d'artistes dont les convictions révolutionnèrent la scène artistique italienne des années 1960. Leur ambition fût de rapprocher l'art et la vie, de reprendre conscience de la réalité, du monde environnant ; à contre-courant de la forte industrialisation italienne d'alors, de la domination de la scène artistique américaine, du consumérisme déjà !
Dans ce but ils usent de matériaux simples « pauvres » (terre, bois, eau, chiffons, objets du quotidien, ou de récupération) nous enjoignant ainsi à participer d'un monde réel, vivant. Pour exemples : la boussole de G. Anselmo dont l'aiguille est mue par la force magnétique terrestre, flux nous traversant également ; ou la forme d'un souffle dans un lit de feuilles de G. Penone, explorant notre relation au monde végétal.
« Tout est déjà là. Il faut juste mettre le monde au monde » dira A. Boetti.
Treize artistes sont présentés, certains certes plus déroutants, provocants, mais comme le fût le futurisme en son temps ! Outre Anselmo et Penone, Fabro, Merz (Mario et Mariza), Pistoletto…
L'Arte Povera élargit, éclate même les cadres de l'art traditionnel (peinture, sculpture...), créant les premières installations et requérant une forte implication du spectateur : son attention, sa réflexion.
« Et l'une d'elles n'est pas des moindres car elle enfante une pensée écologique dans l'art par l'art », conclut Carolyn Christov-Bakargiev, commissaire de l'exposition.
L'automne, nous le savons, est une saison très riche d'expositions. Aussi ne puis-je en citer que quelques-unes. Parmi elles, l'affrontement puissant mais non provocant de :
« Rodin / Bourdelle. Corps à corps »
Musée Bourdelle, jusqu'au 2 février 2025
On y mesure l'héritage, tout autant que l'émancipation d'Antoine Bourdelle (1861-1929), vis-à-vis de son maître Auguste Rodin (1840-1917), dont il fut le praticien quinze ans durant.
Comment alors ne pas évoquer :
« Camille Claudel à l'oeuvre : Sakountala »
Musée Camille Claudel - Nogent-sur-Seine, jusqu'au 12 janvier 2025
Le musée présente une oeuvre majeure de Camille Claudel (1864 – 1943), « Sakountala » inspirée d'une histoire d'amour de la mythologie hindoue. Une sculpture que l'on admire ici, déclinée au fil du temps, dans des matériaux, des formats, des titres même différents (l'Abandon, Vertumne et Pomone). C'est là une très émouvante manière de plonger au coeur de la vie et l'art de Camille Claudel.
Il serait bien coupable de terminer sur ce seul chef-d’oeuvre, alors que nous attendent :
« Chefs-d’oeuvre de la Galerie Borghèse »
Musée Jacquemart-André (superbement restauré)
Jusqu'au 5 janvier 2025
Nous y accueillent en effet Titien, Véronèse, Botticelli, Raphaël et la troublante sensualité du « Garçon à la corbeille de fruits » de Caravage.
Sublime étape !
Pour une belle fin d'année ;
Pour vous,
Christine Leduc
Si vous voulez nous soutenir et adhérer à notre association, rubrique NOUS SOUTENIR.
18/05/2024
Les jours filant, se dessine un irrépressible besoin de lumière, de chaleur, de couleurs, de vert, de bleu, de jaune, de rouge... ce rouge précisément, si généreusement offert par Henri Matisse à l'exposition :
« Matisse, L'Atelier rouge » Fondation Vuitton jusqu'au 9 septembre 2024
Cette présentation raconte l'histoire de cette toile de 1911, d'abord refusée par le collectionneur Chtchoukine, puis acquise par un club privé londonien, avant d'être finalement rachetée par le MoMA New York en 1949.
« Ce tableau demeure une pierre de touche, nous confie Ann Temkin, conservatrice en chef du MoMA, la décision radicale de Matisse de saturer la surface de l'œuvre d'une couche de rouge (précédemment travaillée de différentes couleurs) a fasciné des générations d'artistes parmi lesquels Mark Rothko et Ellsworth Kelly ».
L'audace d'un tel geste, annihilant toute perspective au profit d'un monde flottant, incandescent, se double d'une prouesse : l'exposition des œuvres figurées dans cette toile, cette vue d'atelier : peintures, sculptures, céramiques !
C'est donc bien logiquement que cette ode à la couleur se poursuit par la lumineuse exposition :
« Ellsworth Kelly. Formes et couleurs 1949-2015 » Fondation Vuitton jusqu'au 9 septembre
Nourri, entre autres, du contact, lors de ses séjours en Europe, de Arp, Brancusi, Calder, Le Corbusier, E. Kelly tend peu à peu à une œuvre abstraite, annonçant le minimalisme américain des années 60 (Donald Judd, Carl Andre) auquel on l'assimilera souvent.
Pourtant loin de leur froideur analytique, son travail (peintures, sculptures, collages...) naît d'un regard toujours fasciné, émerveillé sur son monde environnant et se traduit alors en formes amples, généreuses, de couleur pure.
Même s'il réfute toute filiation directe à Henri Matisse, on peut toutefois se prendre à y songer avec notamment « L'Atelier rouge » et plus encore avec les merveilleux papiers découpés à même la couleur, et collés du vieux Maître.
Non équivoque quant à lui, fût le rapport d'amitié liant deux « Maîtres » :
« Amitiés Bonnard-Matisse » Fondation Maeght du 29 juin au 6 octobre
C'est ici également l'occasion de célébrer les 60 ans de la fondation, inaugurée le 28 juillet 1964 par André Malraux (concerts, spectacles, lectures...), et plus avant, les liens intimes, qu'entretenait la famille Maeght tout particulièrement avec ces deux artistes, Pierre Bonnard et Henri Matisse.
L'exposition décline diverses thématiques explorées par tous deux : autoportraits, le peintre et son modèle, lumières du midi..., proposant ainsi de mieux encore appréhender leurs caractères spécifiques.
Mais c'est avant tout exposé là : du soleil, de l'amitié, du génie !
À noter qu'à cette occasion, la fondation, riche d'une extension, redéploie ses vastes collections.
Et nous retrouvons Pierre Bonnard à Aix-en-Provence :
« Bonnard et le Japon » Hôtel de Caumont jusqu'au 6 octobre
Nous cernons ainsi au plus près le regard que porta ce surnommé « Le Nabi Japonard », sur l'art japonais, notamment à la découverte des estampes (du mouvement ukiyo-e ou « monde flottant ») présentées pour la première fois à l'exposition universelle de 1867, et révélant un original traitement de la ligne et de l'espace.
Nous pouvons alors plus encore apprécier les « lumineuses-heureuses » transpositions qu'il en fit dans ses toiles.
A propos des Nabis, se tient au musée de Pont-Aven « Femmes chez les Nabis, de fil en aiguille » du 22 juin au 29 septembre
Ou comment ces femmes, compagnes, mères, sœurs, assistantes, ont dans l'ombre encouragé et participé de ce courant créatif.
L’œuvre de Maurice Denis « Les Muses » de 1893, en est un bien délicat témoignage et hommage.
Notre voyage nous ramène à Paris avec :
« Auguste Herbin-le Maître oublié » (1882-1960) Musée de Montmartre jusqu'au 15 septembre
Le musée l'affirme bien fort :
« Herbin est le secret le mieux gardé de l'aventure de l'art moderne » et de rappeler qu'il figurait chez les grands collectionneurs au début du XXème siècle, tels que Chtchoukine, Morozov, Uhde.
Accordant toujours une place prépondérante à la couleur, l’œuvre d'Auguste Herbin s'imprègne au fil du temps de grands courants artistiques tels que le fauvisme, le cubisme. Il connaît un bref retour à la figuration dans les années 20, pour élaborer enfin, ce qu'il nommera son « alphabet plastique » : soit des couleurs pures associées à des figures géométriques planes... et à des sonorités : un langage
nouveau universel « synesthésique » comme en rêvait également Kandinsky.
Ainsi, par exemple la lettre E est associée au rouge, à une sphère et à la note do.
Co-fondateur avec Georges Vantongerloo du groupe Abstraction-Création, son travail influencera la seconde génération d'abstraction géométrique et particulièrement les tenants de l'art cinétique tel Vasarely.
Grande figure de l'art moderne, pour sa part fort reconnue :
« Brancusi » (1876-1957) Centre Pompidou jusqu'au 1er juillet
On s'y rend en hâte, l'exposition fermant donc ses portes le 1er juillet (le Centre Pompidou, les siennes en 2025… pour plusieurs années), et pour l’œuvre sublime de Constantin Brancusi, entre abstraction et figuration.
Le noyau en est son atelier, véritable matrice de sa création, situé à l'origine impasse Ronsin, légué à l'état français et reconstitué à l'identique au Centre Pompidou.
Le parcours s'enrichit de nombreux prêts venus des États-Unis et de Roumanie, son pays natal.
Il retrace alors le parcours de ce père de la sculpture moderne, renouant avec la pratique de la taille directe (bois, pierre), s'acheminant vers des formes toujours plus épurées, intemporelles, non moins évocatrices et pour la plupart au poli parfait (bronze, marbre) se jouant de la lumière dans l'espace.
Ainsi ses « colonnes sans fin » (son rêve : une colonne sans fin dressée vers des mondes, de l'autre côté du monde), ses « oiseaux dans l'espace » (« ce n'est pas l'oiseau que je sculpte, mais le vol » déclareraIt-il en 1927 aux autorités douanières américaines, lui refusant le statut d’œuvre d'art), « ces muses endormies » : un ovale parfait, ces « coqs » : une crête dressée. C'est là tout un répertoire poétique humoristique parfois, qu'il décline en d'infinies et merveilleuses variations, quelques 40 ans durant pour enfin « exprimer l'essence des choses, au-delà des apparences ».
Sortons à présent des ateliers pour un grand « courant d'art impressionniste » soufflant cet été sur toute la France : Renoir à Limoges, Orléans... Sisley à Strasbourg, Tourcoing... Monet à Ajaccio, Chartres,
Douai, Lille, Clermont-Ferrand, Honfleur (en Normandie, important festival impressionniste jusqu'au 22 septembre)... pas moins de 178 œuvres ainsi partout prêtées par le musée d'Orsay, pour célébrer avec faste les 150 ans de ce mouvement, révolutionnaire, ne l'oublions pas.
Et à Paris se tient :
« Paris 1874. Inventer l'impressionnisme » Musée d'Orsay jusqu'au 14 juillet
Vous connaissez sans doute ces mots célèbres de Louis Leroy, journaliste au Charivari, face au tableau de Claude Monet « Impression, soleil levant » : « Impression, j'en étais sûr, je me disais aussi puisque je suis impressionné, il doit y avoir de l'impression là-dedans... ».
Des mots qui scellèrent un peu plus tard le nom de ce courant, nom alors revendiqué par les artistes eux-mêmes : l'impressionnisme.
Des artistes désireux de traduire désormais la vie, là où elle palpite : dans les campagnes, à la mer, dans les villes, là où la modernité est en marche (gares, Grands Boulevards...) et cela en marge d'un art d'atelier dit « académique ». L'exposition actuelle n'a pas, pour autant, l'ambition de retracer cet élan dans toute son amplitude, sa durée, mais de souligner, de cerner ce point de bascule.
Aussi pour comprendre l'importance du contexte, le parcours commence par une salle gris-cendre avec des œuvres évoquant ces événements si proches : la défaite de 1870 et l'insurrection sanglante de la commune en 1871. On discerne alors mieux, une France aspirant à plus de légèreté, de liberté : c'est dans cet esprit « réactionnaire » que s'ouvre le 15 avril 1874, dans l'ancien atelier du photographe Nadar, la première exposition « impressionniste », y figurent entre autres, Monet, Renoir, Sisley, Pissarro, Degas, Morisot...
Mais l'actuelle exposition d'Orsay évoque aussi, cette même année, le toujours indétrônable salon officiel. On y trouve bien sûr de ces peintres académiques tels Gérôme, Gervex, mais aussi des artistes qui n'auraient pas déparé chez Nadar, tels Manet, Gonzalès, Cassatt et qui d'ailleurs, pour la plupart, rejoindront ces dissidents.
Le parcours s'achève sur l'évocation de la 3ème exposition impressionniste de 1877 (elles seront au nombre de 8 de 1874 à 1886) avec de lumineuses, vibrantes, vivantes toiles telles que le « Bal du moulin de la Galette » Renoir 1876 ou les évanescentes fumées de « La Gare Saint-Lazare » Monet 1877. Une expérience immersive inédite : il vous est proposé de revivre l'inauguration de 1874 !
Et pour terminer, toujours guidé par la lumière-couleur, permettez-moi ce pas de côté : un rendez-vous au musée du Louvre devant l'éblouissante œuvre, récemment restaurée.
« La Vierge du chancelier Rolin » Jan Van Eyck - huile sur bois - vers 1430
Une exposition-dossier passionnante « Revoir Van Eyck, la Vierge du chancelier Rolin » se tient jusqu'au 17 juin avant que le tableau ne rejoigne sa cimaise dans l'aile Richelieu.
Éblouissante, elle l'est par la richesse de sa symbolique certes, mais magnifiée par la multitude de détails désormais parfaitement révélés, leur beauté (les chapiteaux, le paysage à l'arrière-plan, précis autant que lumineux et aérien...), son éclat retrouvé (l'éclat de ses bleus lapis-lazuli, l'intensité du rouge du manteau de la Vierge : puissance de la couleur de Van Eyck à Matisse !).
Et c'est avec autant d'enthousiasme que je vous souhaite un très bel été.
Pour vous.
Christine Leduc
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29/01/2024
Soyons en assurés, les beaux jours se profilent.
Ernest Hemingway, dans son ouvrage « Paris est une fête » nous l'affirmait déjà : « il y avait tant d'arbres dans la ville, que vous pouviez voir le printemps se rapprocher de jour en jour, jusqu'au moment où une nuit de vent chaud l'installerait dans la place, entre le soir et le matin ».
Résidant alors à Paris en ces années 20, il y fait connaissance d'artistes dit « de la modernité » ; de cette modernité que nous propose de revisiter le Petit Palais.
« Le Paris de la modernité 1905-1925 » jusqu'au 14 avril 2024
Un parcours époustouflant y retrace l'effervescence de cette époque, tant au niveau artistique que technologique et architectural, dans cette ville lumière où affluent des artistes du monde entier.
Le scandale de la « cage aux fauves » du salon d'automne de 1905 ouvre le bal, puis ce seront Sonia et Robert Delaunay, Max Ernst, Fernand Léger, Kees Van Dongen, Tamara de Lempicka, Gino Sévérini (futuriste italien) ...
A propos de Robert Delaunay, y figure sa toile « hommage à Blériot » 1913-1914... et rien moins que l'aéroplane de Deperdussin (1911).
Sont également évoqués la mode avec, inspirés des ballets russes, des créations de Paul Poiret ; la musique avec le jazz, Joséphine Baker et la revue Nègre, le ballet « Parade » de Satie (imaginé par Cocteau, décors et costumes de Picasso et chorégraphie de Massine).
Tant d'autres domaines nous appellent (architecture, arts décoratifs) avec, entre autres, Mallet Stevens, Rateau, Ruhlmann, Lalique... époustouflant parcours avons-nous dit !
L'exposition du Petit Palais met aussi en lumière la place des femmes, leur émancipation après la Première Guerre Mondiale : parmi elles, la sculptrice :
Chana Orloff (1888-1968)
exposée au musée Zadkine jusqu'au 31 mars : « Sculpter l'époque »
Précisément, en cette « époque moderne », sa reconnaissance fut fulgurante. Quelque peu oubliée ensuite, gageons que cette exposition soit un prélude à la redécouverte de son œuvre tant de bois, de pierre, de ciment (une des premières à utiliser ce matériau) que « de chair et de sang » selon ses propres mots.
Née en 1888 dans l'actuelle Ukraine, elle développe d'abord des talents de couturière, rejoint le « Paris de la mode » en 1910 et y rencontre Soutine, Chagall, Modigliani, Zadkine...
Dès lors attirée par la sculpture, elle connait le succès dès son exposition au salon d'automne de 1913 et cela malgré, dira t-elle, son statut « d’étrangère, femme, juive, artiste » ... et bientôt veuve, élevant seule son fils Didi.
Son succès repose sur sa capacité à faire entrer le genre portrait dans la modernité, tout en préservant la ressemblance, nous livre la commissaire d'exposition et directrice du musée Zadkine, Cécilie Champy-Vinas.
Chana Orloff travaille ainsi par épure, ne conservant que les lignes de force et dont la patine reflète la lumière.
Après la Guerre, tout son travail pillé ou détruit, son modelé se fait plus tourmenté, expressionniste, réalisant par ailleurs plusieurs commandes pour l'État d'Israël.
Restons dans cette « moderne époque » avec l'exposition :
« Dans l'appartement de Léonce Rosenberg … »
Musée Picasso jusqu'au 19 mai
Au fait de sa gloire, en 1928, le marchand collectionneur désire « une œuvre totale » : soit un artiste pour chacune des 11 pièces de son appartement.
L'exposition est donc une évocation du lieu et de cette belle ambition : une quarantaine d'œuvres comme par exemple le « Cycle des gladiateurs » de Chirico pour le hall d'entrée, « Transparences » de Picabia dans la chambre de son épouse, Gleizes pour celle de sa fille Jacqueline.
Czaky, Valmier, Léger, Metzinger, Ernst...des artistes entre post-cubisme, retour à la tradition, surréalisme, au milieu des meubles anciens et modernes nous font revivre ce magnifique passé, toujours cher à nos yeux.
Nous pouvons à présent nous plonger dans les abîmes colorés de :
« Mark Rothko » (1903-1970)
Fondation Louis Vuitton jusqu'au 2 avril
Le parcours chronologique de cette exposition s'ouvre sur une période figurative (portraits, scènes urbaines avec des influences surréalistes dans les années 40).
Période qu'il clôt dès 1946, bouleversé comme tant d'artistes par la révélation de la Shoah. Rappelons que Marcus Rothkowitz est né en Russie en 1903, son enfance marquée par les pogroms, ceux-ci contraignant sa famille à l'exil en 1913.
Aux États-Unis, avec Barnett Newman, Clyfford Still, Jackson Pollock et d'autres, commence alors l'aventure dite « expressionnisme abstrait américain »
Après sa série « Multiforms » Mark Rothko simplifie peu à peu ses compositions pour n'en retenir que l'essentiel : la lumière émanant de la couleur, soit des rectangles sans réel contour, flottant, vibrant d'un halo étincelant, fruit d'une technique, ne nous y trompons pas, très élaborée de fines couches de glacis superposées : « Color Field painting » les nomme le critique Clement Greenberg. C'est ainsi qu'il veut nous mener par un état d'hypersensibilité visuel et émotionnel, aux profondeurs de la conscience, de la condition humaine entre « Clarté et Ténèbres ». Des ténèbres transcrits au soir de sa vie, par sa série « Black on Grey » (1969), qu’accompagnent, que hantent ici les hautes silhouettes d'Alberto Giacometti.
« Je ne m'intéresse qu'à l'expression des émotions humaines fondamentales, tragédie, extase, mort... ». « Mon art n'est pas abstrait, il vit, il respire » souffre et meurt, pourrait-on ajouter, se donnant la mort en 1970.
Après Mark Rothko, intellectuel nourri de la pensée de Nietzsche, Freud, Jung, allons à la rencontre de :
« Lacan, l'exposition. Quand l'art rencontre la psychanalyse »
Centre Pompidou-Metz jusqu'au 27 mai
Possesseur un temps du si fameux tableau, « L'Origine du monde » de Gustave Courbet, Jacques Lacan entretenait plus largement, de fortes relations avec le monde de l'art ; relations dont il faisait souvent référence lors de ses légendaires séminaires.
Une centaine d'artistes sont ici convoqués, ponts jetés entre sa pensée (aux concepts parfois complexes !) et des problématiques toujours actuelles.
Mais c'est peut-être d'abord, avouons-le, le bonheur de voir, revoir des œuvres d'une incontestable puissance telles le sublime « Narcisse » de Caravage (1597, illustrant la théorie du « stade du miroir »), « L'Origine du monde » de Courbet, bien sûr, puis Picasso, Dora Maar, Salvador Dali, Magritte, Niki de Saint Phalle, Louise Bourgeois, Cindy Sherman.
L'année 2024 sera pour nous tous une « heureuse révolution » avec la réouverture, dans son ensemble, du musée d'Art moderne.
150 ans auparavant naissait une toute autre révolution : « Les Impressionnistes » ; plus précisément le 15 avril 1874, dans l'atelier du photographe Nadar. Aussi dans toute la France, printemps et été bruisseront de ce « courant d'air ». Nous aurons bien sûr l'occasion d'en reparler.
Mais sans attendre ces jours, le musée de l'Orangerie poursuit son riche dialogue entre « Nymphéas » de Claude Monet et artistes contemporains
Après Hermann Nitsch et sa puissante « action painting » colorée (jusqu'au 12 février), le calme, voire la méditation s'invitent avec deux artistes :
« Robert Ryman. Le regard en acte »
du 6 mars au 1er juillet 2024
Toutes les nuances, subtilités du blanc, la matière, la lumière, résonnent avec l'œuvre du Maître des lieux.
« Wolfgang Laib »
du 6 mars au 8 juillet 2024
Ses fragiles installations, de cire d'abeille, de pollen... patiemment récoltés, font écho au frémissement, à la fragilité, la beauté de la nature, nous plongeant dans une pure contemplation.
A noter qu'à Deauville, dans ce magnifique couvent restauré « Les Franciscaines » se tiendra l'exposition :
« Zao Wou-Ki, les allées d'un autre monde » (1920-2013),
du 2 mars au 26 mai 2024
Y figurera, entre autres, un tableau « Hommage à Claude Monet » 1991.
Hommage empreint d'émotions, de sensations, au travers de son langage, ses sublimes nuées colorées.
Pour terminer, permettez-moi une incursion où se côtoient avec bonheur, passé-présent. Il s'agit de la réouverture, le 2 février 2024, de la
Fondation Bemberg à Toulouse
Plusieurs années furent, là aussi, nécessaires à la rénovation du superbe hôtel d'Assézat, d'époque Renaissance.
La première acquisition, à 18 ans, du jeune Georges Bemberg (1915-2011, d'origine argentine) fût une gouache de Pissaro. Suivront Monet, Degas, Gauguin, Matisse, Picasso, Bonnard (magnifique autoportrait).
Collection qu'il complètera par un époustouflant panorama de 500 années d'art français, flamand, hollandais, allemand et bien sûr italien.
On y croise des chefs d'œuvre de Le Brun, Boucher, Cranach, Titien, Tintoret, Véronèse...sans oublier mobilier, objets, précieux livres : une merveilleuse plongée dans le temps et l'art.
Aussi je vous souhaite à tous un merveilleux printemps.
Pour vous.
Christine Leduc
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11/10/2023
Et voici l'automne qui porte haut ses couleurs, du vert, jaune, orange, rouge, brun. Des artistes, pour leur part, nous en révèlent richesses et nuances. Attardons-nous-y quelques instants.
Beaucoup de vert, de bleu tout d'abord avec :
"Vincent Van Gogh à Auvers sur Oise. Les derniers mois". Musée d'Orsay jusqu'au 04 février 2024.
C'est en effet, quittant l'asile de St Rémy de Provence, le printemps qui l'accueille dans cette paisible bourgade.
De mai à juillet 1890, pas moins de 73 peintures, dessins, gravures, témoignent d'une nouvelle et intense période créative, mais tout autant d'une intense tension psychique que le docteur Gachet, son ami, tentera en vain de juguler.
D'une éclatante palette enrichie du souvenir de la lumière provençale, Van Gogh s'accorde, vibre à toutes les lignes, tous motifs qui l'entourent : un chemin, des racines, un cours d'eau... De ses paysages, il étire le format comme pour embrasser l'infini, et cela jusqu'à l'ultime, puissante et tragique toile : "champ de blé aux corbeaux" (juillet 1890) "J'entends les ailes des corbeaux frapper des coups de cymbales fortes au-dessus d'une terre dont il semble que Van Gogh ne pourra plus contenir le flot. Par conséquent la mort", dira à son propos Antonin Artaud.
Du musée d'Orsay, nos pas nous portent tout naturellement au musée de l'Orangerie, où nous accueillent :
"Amadeo Modigliani. Un peintre et son marchand" jusqu'au 15 janvier 2024.
Ce lieu abrite, outre le grand décor de "Nymphéas" de Claude Monet, la collection Jean Walter-Paul Guillaume, principalement constituée, par ce dernier et recélant notamment des œuvres de Modigliani. Aussi l'exposition se penche-t-elle sur les rapports "marchands-amis", unissant les deux hommes.
Jeune peintre italien arrivé en 1906 au cœur du Paris, capitale des arts, Modigliani pratique alors avec passion la sculpture, influencé par Brancusi et les arts premiers, inépuisable source d'inspiration pour l’artiste. Une rencontre infléchira sa carrière, celle en 1914 d'un tout jeune et passionné marchand d'art : Paul Guillaume - 23 ans ! Ce dernier conquis par son art l'incite à reprendre les pinceaux, se faisant à la fois mécène et marchand. Entre tradition et modernité, des nus sensuels, des portraits si caractéristiques (frontaux, lignes épurées, chaude et profonde gamme chromatique) constitueront désormais l'essentiel de son œuvre. A l'évidence Paul Guillaume est un excellent marchand, un brillant communiquant : fonde la revue "Arts de Paris" en 1918, organise concerts et lectures en ses galeries (avec Apollinaire, Cendrars, Auric, Satie...). Mais au-delà, entre "Modi" et "Novo Pilota" (surnom donné par l'artiste à son marchand) se tissent d'autres liens, de profondes affinités concernant notamment
les arts premiers et la poésie. "Il jugeait la poésie avec une âme mystérieusement douée pour les choses sensibles et aventureuses" écrira Paul Guillaume. Et l'on sait la vie aventureuse, orageuse et tragique de Modigliani : ses amours, sa mort précoce de tuberculose et le lendemain même celle de sa compagne d’alors, Jeanne Hébuterne, enceinte de leur enfant.
Il ne faudrait toutefois pas se laisser gagner par la mélancolie tant il est vrai que les expositions de la rentrée présentent d'autres de ces destinées, certes brillantes mais tragiques avec Nicolas de Staël et Mark Rothko. Partons donc, avertis, à la rencontre de :
"Nicolas de Staël" musée d'art moderne de Paris, jusqu'au 21 janvier 2024.
"Le Prince foudroyé" titrait en 1998 l'ouvrage de Laurent Greilsamer. Il est indéniable qu'un mythe s'est forgé autour de cette belle et grande silhouette : de l'enfant d'aristocrates fuyant la révolution russe à l'orphelin de cinq ans, l'homme aux incessants voyages "un éternel errant, un exilé qui a besoin d'être ailleurs", à sa dernière et douloureuse passion, jusqu'à ce saut fatal, il a 41 ans. Aussi au-delà du personnage romanesque, les commissaires d'exposition tentent d'embrasser toute la complexité, la densité de sa carrière principalement entre 1945 et 1955. Et cela grâce à quelques 200 pièces : peintures, dessins, gravures dont 50 environ ne furent jamais présentées en France. "Ce qui est étrange et fascinant chez de Staël, c'est qu'une année équivaut à une période de création. Ce phénomène inconscient mais flagrant est visible dans la composition, la gamme de couleurs, la qualité des textures, les outils employés, les formats" note Pierre Watt, commissaire. L'artiste a en effet besoin de "casser", pour à nouveau expérimenter.
Voici donc ici présenté le parcours de cet homme "intranquille", tourmenté dans l'art comme dans la vie. Un parcours chronologique nous fait découvrir des œuvres "maçonnées" strates par strates comme une mémoire enfouie dans sa peinture, puis de larges plages de couleurs et encore des blocs, des tesselles aux lumineuses variations chromatiques. Viendront ensuite des formes allusives : un arbre, une silhouette, un bouquet. Il refuse de trancher entre abstraction et figuration, d'être affilié, dira-t-il, au "gang de l'abstraction" (courant artistique dominant en ces années 50). Sa route le mènera jusqu'à la Méditerranée, livrant des toiles d'intensité chromatique croissante. "Le cassé bleu, c'est merveilleux, au bout d'un moment la mer est rouge, le ciel jaune, les sables violets". Aux limites de
l’épuisement, il s'abime dans sa peinture, désormais diluée et posée à la gaze et au coton ; jusqu'à cette œuvre ultime, inachevée, consumée par un rouge incandescent : "Le Concert" mars 1955. Le silence y répond, à jamais.
Après une telle intensité, permettez-moi de n'évoquer l'exposition de Mark Rothko fondation Vuitton, jusqu'au 04 avril 2024 qu'en la prochaine newsletter, tant tragique encore, et sublime s'y conjuguent.
Partons donc au Nord pour :
"Chagall politique ; le cri de liberté". La Piscine - Roubaix, jusqu'au 7 janvier 2024.
Cette exposition ambitionne de souligner l'engagement de l’artiste, chantre d'un humanisme fraternel, face aux évènements de son siècle. Des évènements qui nous apparaissent alors transfigurés par sa féconde imagination, son audacieuse et merveilleuse palette, sans oublier malgré tout, son savoureux sens de l'humour.
Marc Chagall que nous retrouvons au :
Centre Pompidou Paris : "Chagall à l'œuvre-dessins, céramiques, sculptures de 1945 à 1970" jusqu'au 26 février 2024.
On pourra, entre autres y voir les dessins préparatoires aux costumes et rideaux de scène du ballet "L'Oiseau de feu" d'Igor Stravinsky ; les esquisses et maquettes pour la décoration du plafond de l'Opéra.
Ne quittons pas les lieux sans découvrir : "Corps à Corps - Histoire(s) de la photographie" jusqu’au 25 mars 2024.
Née de la rencontre de deux collections photographiques d’envergure, celle du Centre Pompidou et celle de Marin Karmitz (fondateur de la société MK2 spécialisée dans le cinéma indépendant), cette exposition propose une conversation féconde entre les diverses représentations du corps par des photographes d'hier et d'aujourd'hui ; tels Man Ray, Dora Maar, Brassaï, William Klein, Vivian Meyer, Annette Messager...
Toujours au Centre Pompidou ; "Gilles Aillaud - Animal politique" jusqu'au 26 février 2024.
De somptueux animaux, en cage ou en liberté, nous y contemplent, questionnant alors notre rapport à leur monde, notre monde, vaste monde environnant.
Ce lieu nous retient encore pour : "Picasso - Dessiner à l'infini" jusqu'au 15 janvier 2024, dans le cadre du 50ème anniversaire de sa disparition.
Prolifique, il le fût en bien des domaines, mais plus encore peut être dans celui du dessin. Quelques mille travaux ici présentés en témoignent.
Et nous retrouverons Picasso en bien d'autres endroits :
Au musée Picasso bien sûr, avec : "Sophie Calle. A toi de faire ma mignonne" jusqu'au 07 janvier 2024.
Artiste plasticienne, photographe, Sophie Calle porte un regard curieux et décalé sur un choix d'œuvres emblématiques de Picasso ; puis s'en émancipe pour déployer son propre univers : un original, drôle, quelque peu irrévérencieux hommage au maître des lieux.
Au musée du Luxembourg : "Gertrude Stein et Picasso, l'invention d'un langage" jusqu’au 28 janvier 2024.
"Homme de lettres" : ainsi Picasso définissait-il celle dont il réalisa un portrait fameux en 1905-1906. L'exposition s'attache de fait, à dévoiler les affinités, le fertile dialogue "cubiste" entre l'écrivain, la poète américaine et l'artiste espagnol. Plus loin sera évoquée la postérité en divers domaines, à dominante américaine toutefois, de ce duo légendaire.
Nous avions en premier lieu annoncé : "couleurs". Nous terminerons ce rapide (et non exhaustif !) survol de l'actualité artistique en noir et blanc :
"Trésors en noir et blanc. Dürer, Rembrandt, Goya, Toulouse-Lautrec" : au Petit-Palais jusqu'au 14 janvier 2024.
Car c'est bien de trésors qu'il s'agit là, à voir, à revoir, tant il est vrai que la gravure-estampe est un art à sans cesse redécouvrir : tout de subtilité dans le traitement de la lumière, tout de finesse, de détails, pour plus encore apprécier l’œuvre. Attardons-nous sur l'exceptionnelle "Pièce aux cent florins" de Rembrandt, "Mélancolia" de Dürer, "Les Caprices" de Goya, sur Odilon Redon, Edgar Degas...
A noter : Le Petit Palais transfiguré par l'univers étrange et onirique de l’artiste Loris Gréaud jusqu’au 14 janvier 2024.
Peintures, dessins, photographies, estampes, installations...tant de mondes s'offrent ainsi à nous.
Alors, en leur compagnie : Très Bel Automne !
Pour vous, Christine Leduc.
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23/04/2023
Ouvrons ces pages avec une invitation, promesse de beaux jours.
Le Domaine de Chaumont sur Loire nous convie à la nouvelle « SAISONS D’ART » (jusque au 29 octobre) en son château Renaissance, ses vastes parc et jardins, bel écrin à une déambulation, un voyage entre imaginaire et poésie.
Puis plongeons-nous au cœur de la scène artistique parisienne où deux « face à face » retiennent d’abord notre attention. En fait, c’est un véritable « corps à corps » qui est proposé à la Fondation Vuitton : BASQUIAT ET WARHOL – à quatre mains », jusqu’au 28 aout. Et pourtant, dans les années 80, leur rencontre semble bien improbable. Andy WARHOL (1928-1987, maitre incontesté du pop’art a bâti son succès en exploitant, non sans dérision, les emblèmes de la société consumériste américaine. Jean-Michel BASQUIAT (1960-1988), encore peu connu mais tout de rage de vivre, revendiquant un statut d’homme de couleur, dénonçant, pour sa part, ces mêmes emblèmes consuméristes, usant d’un style graphique percutant. Ironie, c’est un marchand d’art qui les réunira, initiant une collaboration féconde, « électrique voire explosive », « entre jeu et joute » dira Suzanne Pagé. Des années 1983 à 1985 naitront quelque 160 toiles « à quatre mains » (une centaine à l’exposition), de très grand format pour la plupart, où Jean-Michel BASQUIAT, manifestement entraine son ainé, comme « revivifié « , vers des rives plus engagées socialement, politiquement. Mais suite à l’exposition de leurs œuvres, la critique se montrera extrêmement sévère, n'y voyant là qu’un faire-valoir pour Andy WARHOL, brisant à jamais cet élan.
Restons toutefois dans l’univers inspirant de Jean-Michel BASQUIAT avec « BASQUIAT SOUNDTRACKS) » (Basquiat Bandes sonores), à la Philharmonie de Paris jusqu’au 30 juillet. Jazz, blues, reggae (mère d’origine portoricaine, père d’origine haïtienne), hip-hop naissant, mais aussi opéra, classique (dont Beethoven) : sublime fracas ! l’exposition révèle ainsi, tour à tour, et avec talent ces riches sources au processus créatif de Jean-Michel BASQUIAT (des toiles y sont conjointement présentées) ; processus, vous l’aurez compris, puissant, vibrant, vivant… et fulgurant ! (il décèdera en effet à 28 ans d’une overdose)
C’est un face à face plus feutré, nuancé, qui se tient au musée d’Orsay MANET (1832-1883) - DEGAS (1834-1917), jusqu’au 23 juillet. Au travers de ces deux essentielles figures, l’exposition dévoile, de fait, ce que la modernité en ces années 1860-1880, eût d’hétérogène voire de conflictuel, entre rupture et continuité, audace, et citation, tel qu’en témoigne Edouard MANET et le « Déjeuner sur l’herbe » de 1863. C’est un dialogue, et une lecture donc, subtiles, qui s’engagent au fil de cette exposition entre ces deux acteurs de la modernité. Une quinzaine de toiles prêtées par le Métropolitain Museum of Art de New-York, ainsi que par d’autres musées américains, européens et collectionneurs privés ont permis d’enrichir la collection du musée d’Orsay. De salles en salles, notre regard peut alors s’aiguiser, décelant ici et là affinités, dissemblances, emprunts. Manet, pour exemple, brossant « Femme dans un tub», un des thèmes de prédilection de Degas. Ou dans cette scène très « moderne » d’un café : « La Prune » de Manet, dans un ravissant camaïeu de tons blanc-rose-prune, arbore une jolie moue rêveuse alors que dans « L’Absinthe » de Degas, la composition légèrement déséquilibrée, les tons sombres présentent une jeune femme semblant accablée, Degas ayant toujours été très attentif, sensible au dur labeur féminin (« Repasseuses »…). Manet – Degas, une relation complexe donc entre émulation et rivalité.
« Degas aura du succès demain » écrivit Manet. « il était plus grand que nous le croyions » déclara Degas à la mort de Manet, emporté à 51 ans.
Degas toujours, mais en autres compagnies et avec ce médium d’exception : « PASTELS – DE MILLET à REDON », Musée d’Orsay, jusqu’au 2 juillet. Leur fragilité les tient souvent en réserve, aussi sachons apprécier cette sélection d’œuvres (une centaine sur les 500 de la collection d’Orsay) reflétant, après un brillant XVIIIe siècle, un regain d’intérêt pour ce médium dans la seconde moitié du XIXe siècle : Boudin, avec ses « études de nuages » puis Millet, Manet, Mary Cassat, Levy-Dhurmer, Redon et se étranges chimères, Degas bien sûr dont ses vaporeuses danseuses à l’opéra, contrastant avec ce sombre « Départ pour la pêche » de Mondrian : éclectique merveilleux florilège.
DEGAS, encore mais seul cette fois : « DEGAS EN NOIR ET BLANC », Bibliothèque nationale de France, du 31 mai au 3 septembre. Cette originale exposition propose une approche inédite de l’œuvre d’Edgar Degas, signalant bien sa place singulière parmi les artistes impressionnistes. S’y montre son intérêt pour des supports et techniques variés, au-delà de la peinture et du dessin : une passion pour l’estampe avec ces thèmes de la vie « moderne » (opéra, cafés concerts, intérieurs bourgeois…) ou femmes à la toilette, maisons closes… Plus tard la photographie qui lui permettra d’autres expérimentations dont d’audacieux cadrages, repris dans certains de ses tableaux : plongée, contre-plongée, hors champ.
Nous ne quittons pas tout à fait cette époque et la photographie avec, illustrée à nombreuses reprises par Gaspard-Félix Nadar, SARAH BERNHARD, et la femme créa la star ». PETIT PALAIS, jusqu’au 27 aout. Il y a 100 ans, s’éteignait ce « monstre sacré », terme inventé pour elle par Jean Cocteau, « Divine » « à la Voix d’or » pour Victor Hugo se jetant à se pieds ou « Sarah Barnum » pour se frasques réputées dont elle avait fait un art et une puissante publicité. Mais au-delà de cet imaginaire collectif, l’exposition tend à montrer les facettes, les univers de cette femme magnétique tant au théâtre (L’Aiglon d’Edmond Rostand, La Dame aux camélias d’Alexandre Dumas, Phèdre de Racine, Ruy Blas de Victor Hugo et tant d’autres joués dans le monde entier), qu’en ces cercles amicaux (- amoureux), littéraire, artistique, elle-même artiste de talent. 400 objets et œuvres d’art sont alors mis en scène en ce lieu tout à sa mesure : photographies de Nadar, affiches de Mucha, magnifiques portraits de Jules Bastien-Lepage, de Georges Clairin peut-être plus encore, longue ligne vaporeuse, costumes de scènes (Cléopâtre, Théodora…) enregistrements de cette « Voix d’Or » (déclamation certes étranges de nos jours), évocation de son salon-atelier où l’on découvre ses œuvres, des sculptures principalement dont un saisissant « autoportrait en chimère ».
Mais autre qu’une chimère, c’est une présence qui se glisse et parcourt avec nous, le Petit-Palais. Oh combien plus discrète, son nom vous est peut-être d’ailleurs inconnu ? (peut-être moins celui de son mari Hans Hartung ?) ANNA-EVA BERGMAN (1899-1987) Voyage vers l’inconnu. Musée d’Art moderne de Paris, jusqu’au 16 juillet.
Mais avant que d’atteindre une forme de plénitude picturale, le voyage fût long, souvent difficile, mouvementé au travers l’Europe, de sa Norvège natale à la France, à Antibes enfin, tant d’ailleurs au niveau de sa vie personnelle, qu’artistique. Le XXe siècle lui fera découvrir des repères, des amis, un mari aussi (épousé 2 fois à 28 années d’intervalle !) : Klimt, Munch, André Lhote à Paris en 1929, Kandinsky, Mondrian, puis après-guerre Soulages, H. Vieira Da Silva. Hans Hartung bien sûr : c’est alors cette peinture abstraite de la « Nouvelle école de Paris », d’après-guerre. Si un temps pour vivre elle réalise des dessins d’illustration pour des journaux, elle est fascinée par les lignes, la lumière dans la nature. C’est un ami, architecte, restaurateur de cathédrales, qui lui parle équilibre idéal, nombre d’or, géométrie ainsi que de la technique de la feuille d’or, dans les retables médiévaux. Elle a 40 ans, le véritable voyage peut alors commencer. « il nous faut quitter notre vieux monde pour entrer dans le nouveau. C’est un saut périlleux. L’art abstrait » notera-t-elle alors. De ses voyages dans les fjords norvégiens aux paysages méditerranéens, pierres, d’eau, d’astres, elle ne retiendra désormais plus que les lignes évidentes, cohérentes ;
La feuille métallique d’or, d’argent, de cuivre, d’aluminium, lui permettant de matérialiser la lumière telle une couche picturale. C’est « une peinture vivante, lumineuse, contenant sa vie intérieure » s’exclame-t-elle. Une vie qu’elle poursuivra et achèvera avec Hans Hartung dans une maison-atelier à Antibes, véritable utopie architecturale d’espace et de lumière en osmose avec la nature environnante. Aujourd’hui fondation garante de leurs œuvres et ouverte au public de mai à septembre.
Puisque nous sommes dans ce sud de la France, signalons la réouverture du Musée d’art contemporain de Marseille, avec, outre des expositions temporaires (actuellement l’artiste italienne PAOLA PIVI), un redéploiement de sa collection permanente, haut lieu de Nouveau Réalisme (Niki de Saint Phalle, Yves Klein, César, le marseillais) et Annette Messager, Jean-Michel Basquiat…)
Un peu plus loin sur l’ile de Porquerolles, la Fondation Carmignac nous invite à l’exposition « L’ile intérieure » du 29 avril au 5 novembre. Et vous ne serez donc pas surpris d’y retrouver Anna-Eva Bergman en belle compagnie pour d’autres « lumineuses vies ».
Retournons à Paris, un lieu envoûtant, différemment, le Musée de la Vie Romantique, niché au cœur de Pigalle, et ouvrant pour la première fois ses portes à l’art contemporain. Le maître des lieux et peintre romantique, Ary Scheffer y reçoit jusqu’au 10 septembre FRANCOISE PETROVITCH, Aimer – Rompre. Ces deux verbes illustrent bien l’esprit romantique du XIXe siècle, comme témoigne pour exemple un portrait
« revisité » par Françoise PETROVITCH, de George Sand, grande amoureuse s’il en fut ; portrait placé au côté de celui d’Auguste Charpentier en 1837-1839. L’artiste y présente un univers sensible, aux grands aplats de couleurs, séduisantes, acidulées et qui reflète avec une délicatesse teintée de mystère, de mélancolie tout Entre-Deux : celui du sentiment amoureux, de l’enfance – adolescence, du rêve réalité. Et voici le commentaire d’un critique d’art à propos de cette exposition : un univers intrigant à découvrir seul, à deux ou mieux, accompagné de ses ados… » A tenter donc !
Quelques pas nous séparent du Musée de Montmartre avec « SURREALISME AU FEMININ ? » jusqu’au 10 septembre. Bien sûr il y eût Marx Ernest (exposé cet été à l’Hôtel de Caumont, Aix en Provence), Man Ray, Masson, Tanguy… qui explorèrent ces lieux libérés de la raison, de la conscience. Le Musée de Montmartre a quant à lui, l’ambition de présenter d’autres explorateurs, des femmes moins assujetties à la « doxa », la ligne édictée par André Breton, plus libres peut-être… mais à quel prix souvent ! Nous y croiserons là, connues et moins connues, Dora Maar, Lee Miller (on le sait désormais à l’origine du principe photographique de solarisation, cher à Man Ray), Meret Openheim, Leonora Carrington (merveilleux univers de celle qui fût un temps l’épouse de Max Ernest) et Jane Graverol, et Franciska Clausen et tant d’autres en ce si accueillant « Petit Musée ».
Et partout sur vos routes :
A Metz (Centre Pompidou) jusqu’au 11 septembre, « SUZANNE VALADON, un monde à soi ».
A Villeneuve d’Ascq (LAM jusqu’au 2 juillet) ISAMU NOGUCHI ; au-delà de ses célèbres et délicates lampes en papier, un artiste absolu entre sculpture, architecture, scénographies (avec Martha Graham).
A Nantes HYPER SENSIBLE, jusqu’au 3 septembre, sculpture hyperréaliste (sans oublier les collections permanentes de ce lieu magnifique… 6 ans de travaux de rénovation !)
A Arles, à Montpellier, à Rodez (Musée Soulages, son architecture, les œuvres de son hôte)
Mais tout d’abord, avec vos proches, vos amis, vos familles
Très bon été
Bien à vous
Christine Leduc
Si vous voulez nous soutenir et adhérer à notre association, rubrique NOUS SOUTENIR.
23/04/2023
Et d’abord ce vœu, déjà en partie certes exaucé, avant que de l’être entièrement courant de cette année 2023 :
« R’ENTRONS AU MUSEE »
Aussi pour ce premier trimestre d’actualités, ai-je fait le choix d’évoquer des expositions, pour la plupart, en lien avec des œuvres du musée d’art moderne de Troyes (MAM), afin d’enrichir, peut-être, nos connaissances, notre plaisir certainement. Et cela d’autant que les expositions dites « grandes » s’épanouissent plus volontiers au printemps.
Ainsi Germaine RICHIER (1902-1959) au Centre Pompidou à Paris du 1er mars au 12 juin 2023. Dans le jardin du musée, se dresse une de ses sculptures « La Spirale » de 1956. Elève de Bourdelle à la Grande Chaumière, elle mature peu à peu son propre langage ; langage dans lequel le corps humain reste l’élément, même ténu, de référence, tout en développant des tendances expressionnistes voire fantastiques imprégnées des mondes humain, animal, minéral, cosmique. Ainsi par exemple « l’Orage » de 1947-1948 (et sa version féminine « L’Ouragane » de 1948) imposent leurs silhouettes puissantes, « telluriques », conjuguant ces divers univers. Ou encore ses figures « insectiformes » (L’Araignée, la Chauve-Souris, la Cigale et autres créature surréelles), piégeant l’espace par un réseau de fils. Elle exposera, notamment en 1948 à Berne pour « Sculpteurs contemporains de l’école de Paris » au côté de Giacometti, Laurens, Lipchitz…
Liée par ailleurs aux peintres Hans Hartung, M.E Vieira da Silva ou Zao Woo-Ki , elle intégrera parfois, dans les années 50, la couleur à ses sculptures. « La Spirale » de 1956, se situe dans une phase où Germaine Richier pousse sa réflexion tendant à réduire son langage plastique jusqu’à cette forme d’abstraction. Œuvres et personnalité fortes, donc qu’Ariane Coulondre, commissaire de l’exposition, nous présente comme « une sorte de chainon manquant entre Rodin et César ».
Et puisque nous nous trouvons au Centre Pompidou n’hésitons pas à (re)parcourir les espaces consacrés à l’art moderne… et contemporain.
Récemment sur les cimaises du MAM de Troyes, nous avons pu découvrir ce tableau : La Plaine (ou les bords de la Tamise) H/T 1954, de Maria-Elena VIERA DA SILVA (1908-1992). Une exposition lui est consacrée au Musée des Beaux-Arts de Dijon jusqu’au 3 avril 2023. Née en 1908 à Lisbonne, elle fut très tôt, par sa famille, sensibilisée aux pratiques artistiques. Installée à Paris en 1928, elle y poursuit son apprentissage auprès de Bourdelle et Despiau. Se tournant ensuite vers la peinture, elle approfondit sous le regard de Léger et Bissière, les questions de composition, de perspective, depuis peu « bousculées ». Très inspirée par l’œuvre de Torses Garcia (qui, dans un art « constructif » entre abstraction – figuration veut réunir raison - émotion – nature), elle l’enrichira de la couleur, puisée aux toiles de Bonnard. Sur des emprunts au monde réel tels qu’en témoignent nombre de titres (Les Tisserands, la Bibliothèque, Filet… mais aussi Naufrage, Insurrection, Incendie…), elle élabore une sorte de grille, de damier, de « mise au carreau » (influence de l’azulejo peut-être ?) de la couleur, une couleur aux gammes somptueuses, puissantes ou évanescentes. S’y révèlent des espaces fragmentés, souvent labyrinthiques, chemin vers la non-figuration. Et sur ce chemin, elle rencontrera des artistes tels Poliakoff, Hartung, Estève, Bazaine, Soulages… (et Germaine Richier, donc). Groupe non réellement constitué, aux aspirations diverses mais souvent qualifié de « Nouvelle Ecole de Paris ».
L’exposition de Dijon se constitue en 2 parties : un premier temps « l’œil du labyrinthe », soit une rétrospective de son œuvre. Deuxième temps, « l’œil des collectionneurs » : où est mis en lumière la relation privilégiée de l’artiste avec ses mécènes : Kathleen et Pierre Granville, généreux donateurs et initiateurs de la collection d’art moderne du musée de Dijon.
Approchons-nous à présent d’Ossip ZADKINE (1988-1967) et de son œuvre au MAM de Troyes : « Projet de monument à Guillaume Apollinaire » 1937. Puis rendons-nous à Paris au Musée ZADKINE, pour « Ossip Zadkine – une vie d’ateliers » jusqu’au 2 avril 2023.
C’est là une exposition anniversaire célébrant les 40 ans du musée et ces mêmes 40 ans de création de 2 artistes : Ossip Zadkine et Valentine Prax, son épouse, peintre quant à elle. On y découvre en effet, en ce lieu retiré, merveilleux, un esprit préservé d’atelier, une vie de foyer-atelier. Et cela grâce à la présence de leurs œuvres respectives (des peintures de Valentine Prax rarement montrées), d’objets (livres, samovar…) et de photographies notamment d’André Kertesz. « Viens voir ma folie d’Assas et tu verras comme la vie d’un homme peut être changée par un pigeonnier, par un arbre », confiait Ossip Zadkine à un ami. Originaire de Vitebsk (aujourd’hui en Bielorussie), arrivé à Paris en 1909 à la Ruche, il participera au renouveau de la sculpture au XXe siècle, avec bien sûr d’autres artistes tel Brancusi, Lipchitz… Intégrant tant l’héritage de la sculpture romane, de Rodin, des arts africains, comme des avant-gardes dont le cubisme, il élabore un style original, un lyrisme expressif aux formes anguleuses, multiples, où creux et reliefs se jouent entre ombre et lumière. Une sensibilité particulière l’incline souvent à traduire musique ou poésie. Tout aussi inspirée, foisonnante… et colorée se révèle à ses côtés, la peinture de son épouse Valentine Prax.
Où il est aussi question de peinture avec l’exposition MATISSE – Cahiers d’art, le tournant des années 30 » du 1er mars au 29 mai 2023, Musée de l’Orangerie. Pas que de peinture, bien sûr, le MAM de Troyes possédant déjà dessins, tapisserie… et peinture. En 1930, Matisse quitte la France pour un voyage aux Etats Unis, puis à Tahiti, marquant un tournant, une réflexion renouvelée comme en témoigne par exemple la genèse de la Danse pour le Docteur Barnes (tryptique conservé à la Fondation Barnes – Philadelphie). Son retour en France, et au cœur de l’actualité artistique, sont envisagés pour cette exposition au prisme des publications « Cahiers d’Art ». Il s’agit de publications artistiques, littéraires initiées, éditées par Christian Zervos (de 1926 à 1960), célèbre critique d’art, collectionneur, écrivain. Ces pages « d’avant-garde » mettent en lumière des artistes tels que Braque, Miro, Kandinsky, Mondrian, Duchamp, Le Corbusier, Picasso… et Matisse donc, tant pour sa peinture radicale d’avant1916 que celle de ces années 30, aussi radicale en ce sens qu’elle préfigure les papiers gouachés, découpés. C’est ainsi le bonheur de découvrir au Musée de l’Orangerie des œuvres de ces années, pour beaucoup conservées aux Etats-Unis, des dessins, gravures, sculptures… et des publications « Cahiers d’art », bien sûr.
Souvent associé/opposé à Matisse, se dresse la figure de PICASSO : au MAM de Troyes, dessins et sculpture : « le Fou », un bronze de 1905.
Nous pensions avoir déjà beaucoup vu de PICASSO, il n’en est rien !! l’imagination de présentations est sans limite. De Paris à Antibes, de Malaga, Madrid à New York, ce ne sont pas moins de 42 expositions qui célèbrent, célèbreront le cinquantenaire de la mort du Maître (1881-1973).
Vaste choix ; et je ne ferai ici qu’en citer quelques-unes :
- Au Musée Picasso – Paris, c’est le créateur de mode Paul Smith qui repensera un accrochage haut en couleur (toute notre confiance !!) des collections du musée (du 7 mars au 27 aout 2023).
- Le Musée de l’Homme explorera son rapport à l’art préhistorique (8 février au 16 juin 2023).
- Antibes se penche sur la dernière période, soit de 1969 à 1972 (8 avril au 25 juin 2023)
- Tout près, Vallauris et la céramique (6 mai au 30 octobre 2023).
Et plus loin, la Fondation Beyeler, plus loin encore le Guggenheim de New York, apporteront leur éclairage sur cette tutélaire figure du XXe siècle.
Bientôt aurons nous le plaisir de découvrir, au MAM de Troyes, deux très beaux ouvrages de LEOPOLD SENGHOR (1909-2001), illustrés à sa demande par des artistes majeurs de l’art moderne et contemporain. Aussi, dans cette attente, vous convierai-je au Musée du Quai Branly pour « Senghor et les arts – Réinventer l’universel » du 7 février au 12 novembre 2023. A la fois poète, essayiste et président du Sénégal de 1960 à 1980, L. Senghor n’eut de cesse de se battre pour que l’Afrique puisse elle-même « écrire » son histoire. Dans cet idéal de (re)connaissance mais aussi de dialogue (« un rendez-vous du donner et du recevoir », disait-il). Le musée du Quai Branly lui rend hommage au travers de sa propre collection africaine, d’écrits, de poèmes illustrés par, en autres, Pierre Soulages, Hans Hartung ; tendant ainsi, autant que faire se peut, à rendre compte de cette belle pensée universaliste.
Puisque nous nous trouvons en ces lieux, attardons-nous quelques temps encore pour cette présentation : « Kimono », jusqu’au 28 mai 2023. Grande histoire, en effet, de ce qui fût plus qu’un simple tissu, tant au Japon qu’en Occident. Apparu il y a un millénaire, il est adopté sous l’ère Edo (1603-1868) par tous les japonais pauvres et riches, samouraïs, ou geishas. Il s’exprime, véritable acteur, avec le théâtre kabuki et se révèle enfin au reste du monde quand le Japon s’ouvre au commerce extérieur vers 1850. Les artistes s’emparent de ce vent artistique nouveau (Monet, Whistler, Van Gogh…), les couturiers tout autant de Paul Poiret et Alexandre Mac Queen.
Avant de revenir au musée, restons encore un peu sur ces routes vagabondes. Après le Japon, celles d’un Orient rêvé avec le Musée du Louvre, « splendeurs des oasis d’Ouzbékistan » jusqu’au 6 mars 2023. Où bijoux, céramiques, peintures, miniatures merveilleuses de l’école de Boukhara au XVIe siècle, nous emportent.
Et « Sur les routes de Samarcande, merveilles de soie et d’or », à l’Institut du monde arabe jusqu’au 4 juin 2023. Où comment au-delà des siècles, des frontières, l’art tisse des liens, de magnifiques liens, que nous aurons à cœur de conserver.
A très bientôt donc, nous l’espérons, au MAM de Troyes, pour une Très belle année à Tous.
Pour vous,
Christine Leduc
Si vous voulez nous soutenir et adhérer à notre association, rubrique NOUS SOUTENIR.
20/10/2022
Tout honneur en cette rentrée aux Arts et Lettres avec la réouverture, après 12 ans de travaux… du site historique, dit Richelieu, de la BNF (Bibliothèque nationale de France), en plein cœur de Paris. Il s’agissait là d’un défi titanesque : celui d’harmoniser divers bâtiment, courant du XVIIe au XXe siècle. C’est désormais un magnifique écrin, dans un havre de verdure qui s’offre aux visiteurs, où les aménagements contemporains, dont l’escalier d’honneur, véritable sculpture d’acier et d’aluminium, dialoguent sans heurts avec les espaces patrimoniaux. Parmi eux, la célèbre galerie Mazarin, conçue, dès l’origine, pour accueillir la collection du Cardinal. Les fresques baroques des peintres italiens, Romanelli et Gismondi y retrouvent toute leur fraicheur acidulée, tandis qu’en divers lieux du site, les vitrines fascinent par leurs trésors acquis au cours des siècles (collections d’Antiques, Grand camée dit de France, gravures de Rembrandt… à Picasso, manuscrits bien sûr, dont celui de Notre Dame de Paris par Victor Hugo…). Autre merveille, la salle emblématique du site dite salle ovale ou parfois « paradis ovale ». Elle devient, en outre, salle de lecture ouverte à tous (gratuitement, sans inscription) avec quelques 6.000 livres d’art, 2.000 œuvres de littérature… et 9.000 albums de bandes dessinées. Numérique et expositions temporaires complètent le plaisir, sans aucun doute, de ces découvertes.
BNF, 58 rue de Richelieu, actuellement se tient l’exposition jusqu’au 15 janvier 2023 « Molière, le jeu du vrai et du faux », Galerie Mansart.
C’est à un étrange, bouleversant voyage que nous convie le Centre Pompidou, dans le sillage de « l’Intranquille » (titre de son ouvrage paru en 2011), Gérard GAROUSTE, jusqu’au 2 janvier 2023. Environ 120 créations de l’artiste, souvent de grand format, nous invitent, avec ses figures drolatiques parfois, tourmentées souvent, énigmatiques toujours, et au chromatisme puissant voire hypnotique à « quitter le chemin droit et se retrouver dans la forêt obscure ». Ce même chemin que prenait Dante au Chant 1 de l’Enfer dans la Divine Comédie. Car Gérard GAROUSTE plonge, fouille, puise son inspiration dans de grands textes tels la Divine Comédie donc, les Métamorphoses d’Ovide, Don quichotte de Cervantès, Gargantua de Rabelais, Goethe, Kafka… Il se les approprie ensuite au fil d’une quête métaphysique entre raison et folie. A remarquer qu’il s’intéresse tout particulièrement à la Bible et l’Ancien Testament, avec une étude approfondie du Talmud et de la Kabbale, jusqu’à se convertir en 2014 eu judaïsme. Marié à la talentueuse designer Elisabeth GAROUSTE, d’origine ashkénaze, il n’aura de cesse que d’explorer ces textes, hanté, dit-il, par la « duperie que fut son enfance ». Il découvrit tardivement en effet, que son père avait prospéré, vendant des meubles de juifs déportés pendant la guerre. Homme de grande générosité, il créera avec son épouse l’association La Source, pour initier à l’art des enfants en grande difficulté, n’oubliant jamais selon ses dires, que la peinture le sauva de l’abime. Bouleversant voyage, donc !
Avant de poursuivre dans des univers également tourmentés, mais non moins passionnants, accordons-nous une lumineuse respiration avec « Face au soleil, un astre dans les arts », Musée Marmottan jusqu’au 29 janvier 2023. Exposition que l’on devine, bien sûr, sous le regard tutélaire de Claude Monet avec « Impression soleil levant » de 1872 (il y a 150 ans). C’est là un astre fascinant en tous lieux, en tout temps (Egyptiens, Grecs, Aztèques… Louis XIV…). Mais en peinture, son éclat ne se révèlera de fait que tardivement. Hors celui des icônes et des peintres dits « primitifs » travaillant à fond d’or, n’oseront réellement s’y affronter, en révéler puissance et beauté que Claude Gellée, dit le Lorrain, au XVIIe siècle ou plus tard, magistral, Turner. Le noble astre pourra prendre ensuite des accents plus fantastiques, inquiétants, expressionnistes avec des artistes tels Gaspard David Friedrich, Edouard Munch (dont le soleil illumine l’affiche d’exposition) Otto Dix… A la suite des travaux du chimiste Michel-Eugène Chevreul au XIXe siècle, et notamment de son ouvrage « de la loi du contraste simultané des couleurs », c’est à la couleur pure, à la couleur-lumière, que s’attacheront certains artistes (néo-impressionnistes, fauves…) ouvrant un large pan de l’art au XXe (et XXIe !) siècles, ainsi que l’illustrent ici André Derain, Otto Freundlich, Robert et Sonia Delaunay, Gérard Fromanger…
Revenons à Edvard Munch et dépassons un instant son célèbre « Cri » (en existent en fait plusieurs versions), pour découvrir au-delà de cette prégnante angoisse : Edvard MUNCH (1853-1944), « un poème de vie, d’amour et de mort », musée d’Orsay jusqu’au 22 janvier 2023.
Le musée nous offre une vaste rétrospective entre symbolisme et expressionnisme de ce peintre norvégien illustrant l’importance, tout au long de sa carrière, de grands cycles sur précisément la vie, l’amour, la mort. En témoigne une œuvre emblématique « Frise de la vie ». S’il est vrai que sa propre vie fut très tôt traversée de morts (sa mère, sa sœur, de tuberculose), d’amours tumultueuses, d’addictions, de dépressions (interné un temps), il sut toutefois parfaitement maitriser le fil de sa création, attentif à sa diffusion, sa réception souvent, certes, nourrie de scandales… avec pour exemple, une certaine version de sa Madone avec un fœtus mort. Il fréquenta musiciens, intellectuels de son temps tels Strinberg, Ibsen, déclarant : « tout art, littérature comme musique, doit être produit avec notre cœur sanguinolent ». Pour la peinture : « ce doit être des personnes vivantes qui respirent, s’émeuvent, souffrent et aiment ». Pour cela au cours du temps, il simplifiera son langage plastique pour un trait libre, ne s’attardant pas sur les détails, pour une couleur tout aussi libérée du réel, aux jaunes incandescents, violets profonds, verts vifs ou livides ; tous deux, trait et couleur, destinés à souligner la profondeur des états d’âmes, de ses personnages entre mélancolie, angoisse, passion… et destruction parfois. A noter peut-être une somptueuses, envoutantes « Nuit étoilée », hommage, peut-être à Van Gogh, qu’une ombre au premier plan contemple de même : Edvard Munch lui-même.
Ne quittons pas le musée d’Orsay sans (re)découvrir l’œuvre de Rosa BONHEUR, (1822-1899) du 18 octobre au 15 janvier 2023. Personnalité originale, Rosa Bonheur est, pour son époque, l’artiste des paradoxes ; Peinture animalière alors célébrée, rare femme à vivre de son art, elle sut imposer en ce rigide XIXe siècle, sa liberté et son indépendance de vie. Sans anthropomorphisme, sentimentalisme ou complexes mises en scène, ses peintures et dessins insufflent vie aux animaux qu’elle observait inlassablement. De son célèbre tableau « labourage nivernais » (1849), commande de la jeune seconde République, Théophile Gauthier dira, enthousiaste, « sentir la lourdeur de leurs attitudes, la force de leur traction, la lenteur de leur mouvement ». Nous remarquerons que loin de cette attention, ce réalisme, Rosa Bonheur n’esquisse que fort rapidement les humains protagonistes ! complétant cette exposition :
- « Rosa Bonheur intime » jusqu’au 30 janvier 2023, au château By à Thomery, son lieu de vie 40 ans durant.
- « Capturer l’âme, Rosa Bonheur et l’art animalier », tableaux - dessins – sculptures, château de Fontainebleau jusqu’au 23 janvier 2023.
Le Palais Galliera, quant à lui, relève un défi de taille pour évoquer cette autre femme : Frida KAHLO (1907-1954), « au-delà des apparences », jusqu’au 5 mars 2023. Ne nous y trompons pas. Il ne s’agit pas là de ses œuvres, mais de la façon dont, au-delà du handicap, sur son corps même, elle compose son identité de femme et d’artiste. Atteinte à 5 ans de poliomyélite handicapant sa jambe droite, elle survit miraculeusement plus tard à un grave accident mais la colonne vertébrale brisée, le corps définitivement souffrant. Elle revêtira alors cette souffrance de riches couleurs et accessoires, relevant de traditions mexicaines, sud-américaines ou de civilisations précolombiennes. Une photo nous la montre relevant son huipil révélant un corset qu’elle a peint d’un marteau et d’une faucille, affirmation politique sans ambiguïté (en 1937, Léon Trotski et son épouse trouveront refuge chez elle)… et de l’autre côté d’un Quetzalcoat, affirmation là nationaliste avec cet oiseau-serpent fondateur de la civilisation Aztèque. Je préciserai que la Huipil est un élément de ses fameuses robes « Tehuara » richement brodées et souvent présentes dans ses tableaux, superbes remparts à sa douleur. Tous ces accessoires (vêtements, bijoux dont de magnifiques colliers pré-colombien, corsets– prothèses ornées, mais aussi lettres, photographies…) sont issus de la Casa Azul, maison natale de Frida Khalo à Mexico, mis sous scellés à son décès en ce même lieu par son mari, le peintre Diego Rivera et redécouverts en 2004. L’ensemble constitue une vision poignante et magnifique de cette femme, de cette artiste et participe de son extraordinaire magnétisme.
Du Palais Galliera, rendons nous au Musée d’art Moderne de la Ville de Paris pour Oskar KOKOSCHKA « un fauve à Vienne » (1886-1980) jusqu’au 12 février 2023. C’est la première grande rétrospective parisienne consacrée à ce peintre, écrivain, dramaturge, poète, grand voyageur et grand provocateur tout autant. Son art, jamais tiède, témoignera au cours de sept décennies de création, des bouleversements artistiques, intellectuels, politiques de son temps. Qualifié « d’enfant terrible » (« l’enfant prodige sera Egon Schiele très inspiré par lui) dans la Vienne début XXe siècle et soutenu, au cœur de la Sécession Viennoise pour Gustav Klimt et Adolf Loos, Oskar Kokoschka se fera portraitiste de la société contemporaine. Il n’hésitera pas, toutefois, à user d’un trait expressif, « expressionniste », rapide, tourmenté, d’une matière épaisse, puissamment colorée, sans cesse retravaillée ; et cela afin selon lui, de mieux cerner la personnalité du modèle, comme plus profondément encore celle de l’époque tout aussi « tourmentée ». Qualifié plus tard d’artiste dégénéré par le régime nazi, il connaitra l’exil, s’engageant pleinement dans la lutte contre le fascisme. En témoigne par exemple, son tableau « Anschluss – Alice au pays des merveilles » de 1942, stigmatisant l’incurie, la folie humaine. Après la guerre, explorant tragédies grecques ou récits mythologiques pour y trouver un ferment commun aux nations, la puissance toujours subversive de son art ne faiblira guère, étant pour lui le vecteur essentiel pour l’émancipation et l’éducation à la Liberté.
Tant d’autres expositions à Paris, comme ailleurs.
Johan Heinrich FÛSSLI (1741-1825) « entre rêve et fantastique » Musée Jacquemart-André jusqu’23 janvier 2023. « Laissez-vous tenter par la frayeur, elle n’est que le fuit de mon imagination » déclarait-il. Un imagination féconde, nourrie tant par les courants artistiques maniéristes, néo-classique, pré-romantique, germanique (Sturm und Drang : Tempête et Passion) que de mythologies nordiques , de littérature, théâtre,(Goethe, Shakespeare…). Des œuvres aux camaïeux bruns-noirs, nous transportant de la délectation au cauchemar (titre d’une de ses œuvres – 1782).
William MORRIS à la Piscine de Roubaix (8/10 au 08/01/23) A la fois peintre, écrivain, poète et éminent fondateur du courant Arts et Crafts (l’art dans tout et pour tous).
« Cirque » jusqu’au 31 décembre 2022 au musée Matisse du Cateau-Cambresis, avec Chagall, Léger, Rouault, Matisse…
Alice NEEL, « un regard engagé » (1900-1984) Centre Pompidou jusqu’au 16 janvier 2023. Un pinceau engagé, coloré, trempé au plus près de toute humanité.
Photographies avec :
Les tribulations d’Erwin BLUMENFELD, musée d’Art et d’Histoire du judaïsme, du 13 octobre au 5 mars 2023. De riches expérimentations formelles, du mouvement DADA en Europe aux couvertures historiques du magazine américain (où réfugié depuis 1941) Harper’s Bazaar.
Boris MIKAÏLOV – journal ukrainien » (1938, né à Kartiv), Maison européenne de la photographie jusqu’au 15 janvier 2023. Ou comment, avec talent, « saper » la propagande russo-soviétique et sa désinformation de 1960 à aujourd’hui.
Et tout près de chez vous, le désormais fort renommé : Festival international de la photo animalière et de la nature, Montier en Der (Haute-Marne), du 17 au 20 novembre 2022. A l’occasion de la 25e édition, il recevra parmi de très nombreux invités, le prestigieux photographe américain Steve McCurry, présenté, il y a peu au musée Maillol et auteur, entre autres fascinantes images, de la « jeune fille afghane aux yeux verts ». A Montier en Der, c’est l’exposition inédite de son livre « Animals » qui retiendra toute notre attention.
Refermons ces pages dans la lumière de Claude MONET et Joan MITCHELL, Fondation Vuitton, jusqu’au 27 février 2023. En fait 2 expositions : « Rétrospective Joan Mitchell » (1926-1992), et « Monet-Mitchell ». Je ne reviendrai pas tant sur l’œuvre de Claude Monet, que chacun, je pense, à ses diverses périodes, porte en lui, que sur celle de Joan Mitchell et leurs possibles affinités de styles, de sujets, de formats, de lieux aussi car Joan Mitchell s’installera en 1968 à Vétheuil, un endroit de villégiature de Monet et à deux pas de Giverny. Mais tout cela avec beaucoup de précautions, car ne déclarait-elle pas : « j’aime le Monet de la fin (celui des Nymphéas) mais pas celui des débuts ». Elle appartient à ce que certains critiques d’art, après les peintres, expressionnistes abstraits Pollock, de Kooning, Rothko…, nomment la Seconde Ecole de New York avec Sam Francis, Helen Frankenthalter… Alors qu’elle expose à Paris, Pierre Schneider fasciné, écrit « on a l’impression qu’une ampoule électrique brille en plein jour ». L’impression d’un espace naturel lumineux, avec au-delà la lueur d’un espace autre, imaginaire ou mémoriel.
J’oserais parler de « surimpression » de deux espaces lumineux. Mais mieux que ces mots, ceux de l’artiste même : « je peins à partir de paysages ressouvenus que je porte en moi, et du souvenir des émotions qui leurs sont liées, qui bien sûr se transforment. Je ne veux pas du tout refléter la nature mais plutôt ce qu’elle produit en moi ». Et ces mots magnifiques du critique Michaël Gibson en 1982 : « il y a des signes tangibles de combat dans ces œuvres : la peinture est appliquée par balafres, par impulsions et parades ; il y a des obstacles hardiment surmontés, des buissons et des massifs de ronces. Mais en incroyable contraste avec cela, il y a aussi le faste, la gamme entière, joie, tristesse et tendresse de la couleur qui transforment ce combat en un chant ». Faste des jaunes solaires, des bleus profonds, des mauves soyeux, des verts, des rouges… Au-delà de tous mots, impressions, sensations, émotions que chacun de ces deux grands artistes portent en eux et offrent aux regards de tous les spectateurs, à notre seul regard.
Aussi soyons les attentifs regardeurs à toute forme d’art, de culture.
Pour vous
Christine Leduc
Si vous voulez nous soutenir et adhérer à notre association, rubrique NOUS SOUTENIR.
20/06/2022
Avant de s’évader, flâner, regarder ou simplement rêver, je me permets ces quelques mots pour l’Ukraine, pour ses hommes, ses femmes, ses enfants, sa terre, sa culture, tous menacés. « La culture, c’est la mémoire d’un peuple, la conscience collective de la continuité historique, le mode de pensée et de vivre » Milan Kundera, né en Tchécoslovaquie d’alors, en 1929.
Aussi, c’est sans légèreté (M. Kundera toujours !) sans désinvolture qu’au bleu et jaune d’Ukraine, j’ajouterai bien d’autres couleurs illuminant nos fugues estivales.
Et précisément :
« La couleur en fugue » Fondation Louis Vuitton jusqu’au 29 aout.
C’est ainsi que du sol, aux murs, aux plafonds, sous les doigts de cinq artistes internationaux, la couleur sort du cadre pour envahir avec audace, facétie, l’espace (partie d’espace !) de l’iconique bâtiment de Franck Gehry, habituellement immaculé.
Quelques pas nous mènerons de cette immersion joyeuse à l’éblouissement d’un tout autre ordre avec : Simon HANTAÏ (1922 – 2008) l’exposition du centenaire Fondation Vuitton jusqu’au 29 aout.
D’origine hongroise, en exil à Paris dès 1948, Simon Hantaï se rapprochera un court temps des surréalistes puis se découvrira pour maîtres Cézanne, Matisse (« me servir de la couleur comme moyen d’expression de mon émotion, plutôt que pour l’imitation de la nature » Matisse), et Jackson Pollock avec ses fameux « drippings ».
Il s’adonnera alors à une peinture plus gestuelle, adoptant dès 1960 « le pliage comme méthode ». Méthode qui participe de « l’effacement, le dénuement de l’être, de l’artiste » pour, disait-il encore, « rechercher le rien où commencent les choses ». C’est là une quête qui s’incrit dans une démarche spirituelle assumée, assortie d’un mode de vie monacal.
Et ce « rien » se fait lumière de rouge, de bleu, de vert, de jaune, tout étoilé de blanc par les plis, précisément, laissés en réserve : toiles pliées mais aussi plissées, nouées, ramassées… plongeant le spectateur dans la plénitude de ces éblouissements colorés.
De l’éblouissement à l’ivresse… toute raison gardée ! RAOUL DUFY, « l’ivresse de la couleur », Hôtel de Caumont. Aix en Provence, jusqu’au 18 septembre.
Ne pourra -t-on jamais se lasser de son trait si libre, sa palette si vive, ses échappées d’azur qui, de la fenêtre ouverte de son atelier nous portent de Normandie en Provence en Méditerranée ? Également à l’exposition, des illustrations réalisées pour romans et poèmes (Bestiaire de Guillaume Apollinaire, les Nourritures Terrestres d’André Gide…) permettent, une fois encore, d’apprécier son talent de coloriste comme la délicatesse de son trait.
Toujours à l’hôtel de Caumont, « La Fée Electricité », vaste fresque réalisée par RAOUL DUFY (aidé par son frère Jean) pour l’exposition internationale de 1937, renait ici grâce à la magie du numérique. (NB : elle est en permanence exposée au Musée d’Art Moderne de Paris… et intransportable ! 600 m² de surface et de surcroit fragile).
Restons en Provence, à Arles, avec l’artiste coréen LEE UFAN et sa fondation à l’hôtel de Vernon aménagée avec la complicité du très fameux architecte Tadao Ando. Artiste très minimaliste, travaillant matériaux naturels (pierre, bois…), comme industriels, Lee Ufan déclare : « la caractéristique de mon art, ce n’est pas d’imposer un point de vue, mais de proposer une rencontre. L’art contemporain s’est construit autour d’un artiste tout puissant. Mon travail entend prendre du recul, s’éloigner de l’égo, des discours. Posez-vous en face de mes œuvres avec votre cœur, vos sentiments ». La visite peut se poursuivre aux Alyscamps avec « Requiem » : 13 œuvres résonnant avec l’histoire romaine de la ville.
Et bien sûr à Arles, à (re)découvrir : La Fondation LUMA, avec sa riche et éclectique programmation mêlant peintures, sculptures, vidéos, sons, comme en témoigne précisément l’artiste américain Arthur JAFA. Magistral… selon les critiques !
Un fort souffle catalan nous ramène à Paris pour « GAUDI » (1852 – 1926) au Musée D’Orsay jusqu’au 17 juillet. A noter la sobriété de l’intitulé au regard de tant d’autres saluant l’artiste, tels : La Folie Gaudi, Le Génie Gaudi, Gaudi le Visionnaire. L’exposition tend en effet à dévoiler, au-delà du caractère « fantastique » du Parc Güell, démiurge de la Sagra Familia (La Sainte Famille), toute l’érudition, la curiosité, la folle inventivité de cet architecte, héros du « modernisme catalan » ; ainsi y est-il nommé le courant Art Nouveau qui alors traverse l’Europe. Dessins, maquettes, mobilier, révèlent à Orsay, l’intégralité et l’exigence, l’originalité de ses projets comme par exemple à la Casa Battlô ou au Palais Güell. Dans la pierre, le feu, le bois, le verre, la céramique, il conjugue « hors tout cadre » style gothique, style mudéjar, rationalisme et naturalisme. Un total engagement ! c’est ainsi qu’à la fin de sa vie, il se retire dans la crypte de la Sagrada Familia, basilique néogothique, travaillant jour et nuit à son œuvre inachevée… inachevable sans aucun doute !
La ligne fluide, épurée, sensuelle des sculptures d’Aristide MAILLOL (1861-1944) pourra alors se révéler un bien intéressant contrepoint. « La Quête de l’harmonie », Musée d’Orsay jusqu’au 17 juillet.
Après le souffle chaud catalan, rafraichissons-nous avec 2 artistes finlandais Albert EDELFELT (1854-1905) au Petit Palais, jusqu’au 10 juillet, et Akseli GALLEN KALLELA (1865-1931) au Musée Jacquemart-André jusqu’au 25 juillet. 2 expositions qui résonnent étrangement avec l’actualité car leurs œuvres s’inscrivent à une époque où leur pays, sous domination de l’Empire Russe, tend à s’émanciper ; avant d’acquérir son indépendance à la faveur de la révolution bolchévique de 1917. Ces deux artistes accompagneront ce mouvement nationaliste, célébrant l’identité de leur pays tant dans sa nature, sa splendide lumière, sa vie simple et rude, ses mythes tout en se nourrissant de culture européenne, telles les œuvres de Gauguin (1848-1903) ou Munch, norvégien (1863-1944), leurs contemporains. Alors qu’Albert EDELFERT mènera parallèlement à cette veine naturaliste, une carrière de portraitiste mondain (portrait du Tsar Nicolas II, de Louis Pasteur…) Akseli GALLEN KALLELA apparaitra plus radical : une vie ascétique au cœur de la forêt, profonde, une veine plus symboliste, voire mystique, avec de purs paysages, écrins parfois à de mythiques créatures finlandaises.
Et le Petit Palais de nous entrainer, par ailleurs, dans un vibrant tourbillon avec l’exposition « BOLDINI (1842-1931), Les plaisirs et les jours », jusqu’au 24 juillet. A contre-courant des avant-gardes de l’époque, Giovanni BOLDONI ressuscite là, le Paris de la Belle Epoque. Un Paris mondain, de comtesses, baronnes, riches héritières… un Paris brillant, scintillant, de strass, de soies, de velours plissés, froissés, dévoilant, audace, une jambe, une épaule, un cou profond ! N’était-il pas surnommé « Le Déshabilleur ». Face à ces audacieuses poses, Robert de Montesquiou, homme de lettres, poète, critique d’art et dandy à l’extrême raffinement (des gants crèmes, au col cassé blanc, lavallière noire…) semble dans son portrait poser un regard quelque peu hautain, arrogant, insolent peut-être.
Passons au jardin, avec la réouverture du Musée – Jardin ALBERT KHAN, à Boulogne Billancourt. Banquier, grand voyageur, philanthrope, Albert Khan (1860-1940) eut le désir fou de « recenser » le monde pour mieux le comprendre, s’en émerveiller et au-delà encourager la paix : idéal humaniste fauché par sa ruine lors du krach de 1929. Aujourd’hui, après 7 ans de travaux menés par l’architecte japonais Kengo Kuma (le Japon : passion première d’A. Khan), tout est à (re)découvrir : des jardins (du Japon à la forêt vosgienne, dont il est originaire), véritable conservatoire botanique à ces merveilleuses « archives » de la planète en images. Parmi ces images on retiendra les 72.000 plaques autochromes, la plus grande collection au monde, signatures de ce fond unique (NB : il s’agit là du premier procédé industriel de photos en couleurs, inventé en1903 par les frères Lumière).
Poursuivons au jardin, à Giverny, avec son maitre, enchanteur à jamais, et poussons jusqu’au Musée des Impressionnismes, où nous retient un inattendu, face à face « MONET – ROTHKO » jusqu’au 3 juillet. Toiles tardives de Claude Monet (1840 – 1926) et œuvres de Mark ROTKO (1903 – 1970) nous saisissent, nous plongent, nous immergent dans leurs univers sensitifs – chromatiques à l’unisson. Et cela bien au-delà de toute distinction figuration-abstraction (indéniable pour Mark ROTHKO) tant il est vrai que « l’ultime manière » de MONET tendait à l’effacement du sujet même. Et Cyrille Sciama (Directeur Général des lieux) de conclure : « ralentir le rythme, plonger dans la peinture, concentrer son regard dans la matière ; c’est peut-être ce qui relie le plus l’œuvre du Monet tardif à celle de ROTHKO ».
Où il est encore question d’impressionnisme : « Le décor impressionniste », Musée de l’Orangerie, jusqu’au 11 juillet. Il s’agit là d’un pan méconnu de cet art, un pan plus intime, plus familier que, certes, les iconiques Nymphéas. Mais à y bien regarder, un vase en faïence de Mary Cassat, une tapisserie selon une peinture de Claude Monet…, ne serait-ce pas là un art décoratif précurseur de celui, développé peu de temps après, par Bonnard, Vuillard, Denis, Matisse et tant d’autres ensuite ?
Tant de choses encore à découvrir à Paris et ailleurs.
A Albi, au Musée Toulouse-Lautrec « Quand Toulouse-Lautrec regarde Degas » jusqu’au 4 septembre.
Le LAM – Villeneuve d’Ascq, consacre une grande rétrospective (installations, photos, dessins…) à cette figure majeure de l’art contemporain ANNETTE MESSAGER, jusqu’au 21 aout.
« Pionnières » au Musée du Luxembourg – Paris jusqu’au 10 juillet met en valeur ces femmes artistes de toutes les avant-gardes début XXe siècle (Sonia Delaunay, Claude Cahun photographe, Marie Vassillief…). Nous aurons l’occasion de les évoquer lors de prochaines conférences… à suivre, donc !
Au Musée Marmottant, jusqu’au 21 aout « le théâtre des émotions ». Magistrale démonstration de Le Brun, Fragonard, Schiele à Picasso, Richter, Boltanski… entre autres.
Le Musée d’art Moderne de Paris expose jusqu’au 28 aout : EUGENE LEROY (1910-2000), immense artiste originaire de Tourcoing, fin connaisseur des maîtres du passé (Rembrandt, Gréco, Goya… Van Gogh) et dont les sujets, après un long processus créatif, se révèleront à la faveur de riches empâtements de matière, d’une présence puissamment charnelle.
Je terminerai, ou presque, avec une exposition – interrogation « Faut-il voyager pour être heureux ? » à la Fondation EDF. Paris jusqu’au 29 janvier 2023. Troublante et cruciale question en ces temps, que nous posent ces artistes et quels artistes ! tels Andy Goldwarthy, Ange Leccia, Martin Parr…
Aussi me permettrai-je cette proposition, de court et lumineux voyage « Alchimie du vitrail » Musée Camille Claudel, Nogent sur Seine, jusqu’au 26 septembre. Fascinante alchimie, heureuse rencontre de trois artistes qui suscitent mon admiration : Camille Claudel, maitresse des lieux, Fabienne Verdier dont on pourra bientôt admirer l’oculus à la Chapelle de la Cité du Vitrail, et la maitre-verrier Flavie Serrières-Vincent.Petit.
Alors, où que vous alliez, où que vous restiez : soyez heureux ;
« Heureux qui comme Ulysse a fait un long voyage, et comme cestuy-là qui conquit la toison, et puis est retourné, plein d’usage et de raison… (Joachim Du Bellay)
Bien à vous tous
Christine Leduc
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02/02/2022
C’est en bonne, et belle compagnie, que nous vous proposons, en ce début d’année, une artistique promenade au fil des rue parisiennes : YVES SAINT LAURENT guide nos pas.
Le 29 janvier 1962, à seulement 26 ans, et après avoir été directeur artistique chez Dior, le couturier présentait sa première collection personnelle.
Aussi 60 ans plus tard, 6 institutions parisiennes célèbrent les liens qu’au travers ses créations, il entretenait avec l’art, soit par de directes citations (pour exemple la robe Piet Mondrian 1965) ou par son insatiable passion de regardeur et de collectionneur tout autant.
« tout homme est obligé pour survivre, d’avoir, disait Nietzsche, des fantômes esthétiques. Je pense les avoir trouvés, entre autres, en Mondrian, Matisse, Picasso mais aussi et surtout en Proust : je suis tout à fait éclectique », confiait-il en 1990.
Sous nos pas, se déroulent alors modernité au Centre Pompidou avec Matisse, Mondrian, Vasarely, Pollock…, rythmes – couleurs – matières célébrés au Musée d’art moderne, affinités avec le Maître au Musée Picasso (dont la veste du portrait de Nusch Eluard), de l’or en la Galerie Apollon du Musée du Louvre (robe de mariée Shakespeare de 1980, entièrement parée de bijoux) et bien sûr au Musée d’Orsay, l’univers fécond de Marcel Proust ainsi que la question du genre au travers des codes vestimentaires masculin-féminin (pour exemple le fameux smoking décliné au féminin).
Quant au Musée Yves Saint Laurent, ce sont les archives, les documents, les « toiles » qui permettront de saisir, de ressentir la vie même, le processus créatif du couturier, et d’ailleurs :
« je ne suis pas un couturier, je suis un artisan, un fabricant de bonheur ».
YVES SAINT LAURENT AUX MUSEES, du 29 janvier au 15 mai 2022.
A noter concernant Marcel Proust : « Marcel Proust – un roman parisien » au Musée Carnavalet, jusqu’au 10 avril 2022.
Et puis tous ces musées exposant les créations d’Yves St Laurent, comment ne pas résister à flâner, à parcourir bien d’autres salles ; d’autant, que vous l’aurez remarqué depuis tant d’années, les expositions dites « grandes » se dévoilent plus volontiers au printemps et à l’automne ?
Egalement au Musée d’Orsay :
CHEFS D’ŒUVRE DE LA FRICK COLLECTION, portraits de Whistler, du 26 février au 28 mai 2022.
SOPHIE CALLE (photographies… mais pas que ! LES FANTOMES DU MUSEE D’ORSAY, du 15 mars au 12 juin 2022.
C’est à un médium, fait original, que se consacre l’artiste EVA JOSPIN : le carton, agrémenté parfois de papier, bois, métal, coquillages… ce carton qu’elle décline, en œuvres, souvent d’ailleurs monumentales (exemple la magnifique forêt au cœur de la Cour carrée du Louvre en 2016), invitant à l’exploration, la contemplation, la rêverie :
« EVA JOSPIN. Galliera » Musée de la Chasse et de la Nature, jusqu’au 22 mars 2022.
Entre les murs du noble Hôtel de Guénégaux, dans le Marais (hôtel XVIIe siècle, magnifiquement restauré), dédié à la chasse et à la nature, le thème de la forêt s’imposait. Ces forêts, la plasticienne les travaille denses, touffues, mystérieuses, inquiétantes parfois ; sorte de réminiscences, de peurs ancestrales. A l’exposition, une de ses œuvres retiendra plus particulièrement notre attention. Adossée à une forêt donc, se laisse découvrir une galerie (dans laquelle nous nous engageons), évoquant un fascinant et énigmatique studiolo italien : merveilleux dialogue nature – culture.
Tout proche, un bas-relief « minéral » (toujours fait de carton !) – Matera 2018 ; dans les étages supérieurs, un cénotaphe ou encore un jardin baroque. On remarque là, bien sûr, la grande passion d’EVA JOSPIN pour l’Italie antique, renaissance ou baroque (elle fût par ailleurs pensionnaire de la Villa Medicis). Le parcours se poursuit au sein des collections permanentes du musée (dont un très beau tableau de Derain – la chasse au loup, vers 1930), émaillé de créations contemporaines d’artistes invités par EVA JOSPIN et relevant d’une même poésie.
Plus loin, beaucoup plus loin que Paris, que l’Italie, nous découvrons alors le monde avec STEVE MC CURRY, Musée Maillol, jusqu’au 29 mai 2020. Photographe américain, aux 40 ans de carrière, STEVE MC CURRY nous offre là son univers riche d’expériences et d’émotions. 150 œuvres, grand format, aux éblouissantes couleurs de toute une humanité nous entrainent d’Afghanistan (des photographies noir et blanc l’y montre reporter de guerre) au Pakistan, d’Inde à l’Asie du sud-est, du Tibet à l’Amérique du sud. Ces œuvres, portraits pour la plupart, emprunts de dignité quel qu’en soit la situation, se dévoilent à la faveur de salles obscures, au fil d’un lumineux labyrinthe, sans chronologie, ni thématique, ni cultures, ni ethnies : autant de visages, de regards, fascinants regards, qui longtemps, les portes refermées, nous accompagnent.
« une photo peut exprimer un humanisme universel ou simplement révéler une vérité délicate et poignante en exposant une tranche de vie qui pourrait, autrement, passer inapercue ». STEVE MC CURRY.
Une autre destination lointaine, dans l’espace mais aussi dans le temps, nous est proposée au Musée Cernushi, PEINDRE HORS DU MONDE – MOINES ET LETTRES DES DYNASTIES MING (XIVe – XVIIe) ET QUING (XVIIe – début XXe), jusqu’au 6 mars. S’y déroulent une cinquantaine d’œuvres picturales, calligraphiques (rouleaux sur soie, sur papier, parfois de plusieurs mètres de long et bien sûr d’une extrême fragilité) nous plongeant dans le monde « hors du monde » de ces lettrés. Menant une vie frugale, monacale, loin de l’agitation des villes (déjà), ils partageaient leur temps entre méditation, contemplation silencieuse, poésie, pratique de la peinture et de la calligraphie. La nature, qu’elle soit Montagne, tels les pics acérés des monts Huang plantés de pins noueux et nappés de brumes, ou cours d’eau, est alors source d’émerveillement, d’inspiration et de création. Des créations entre réel et imaginaire, et où les personnages humains sont souvent réduits à de très fines silhouettes.
Pour n’en citer que deux, ce pourrait être SHITAO (1642-1707) et ses bambous esquissés d’une touche si légère comme agités par le vent ; ou encore la souplesse du trait de ZHUDA (1626 – 1707) suggérant le frétillement du poisson. Voilà bien une halte sereine et bienfaisante ou le regard se double d’une réflexion à l’acuité toujours actuelle (l’homme et son environnement, son regard précisément, son rapport à cet environnement) et toujours inspirante. Ainsi l’ouvrage photographique de Marc Riboud, préfacé par François Cheng « Huang shan, les Montagnes Célestes » 2004. Par-delà les siècles, Marc Riboux photographe et Francis Cheng poète, célèbrent par leurs clichés et leurs mots, un monde hors d’atteinte, intemporel.
Et de nombreux artistes contemporains chinois se reconnaissent redevables à ces moines lettrés du passé. Pour exemple, l’exposition qui eut lieu en 2020-2021 à Zurich (Musée Rietberg) « l’art chinois à l’écoute du paysage », s’y confrontaient chefs d’œuvre historiques et réalisations contemporaines ; parmi ces artistes : Yang Yongliang notamment.
Après Hors du Monde, PAUL KLEE – ENTRE MONDES, au Lam, Villeneuve d’Asq, jusqu’au 27 février 2022.
Figure singulière des avant-gardes au XXe siècle, PAUL KLEE (1879-1940) aimait se définir comme « peintre-poète », mais un peintre-poète désirant s’affranchir des règles académiques, des canons esthétiques occidentaux, pour explorer de nouveaux territoires, pour revenir aux sources de l’acte créateur. Il s’inspirera, se nourrira, pour cela, d’art pariétal, de dessins d’enfants (dont les siens ! ), de ceux de patients en cliniques psychiatriques (notons l’ouvrage du Dr Prinzhorn en 1922 « Expressions de la folie »,connu de PAUL KLEE), de créations extra-européennes (africaines, orientales) d’art populaire et aussi médiumniques. On comprendra qu’une telle quête, de telles sources multiples foisonnantes, engendrent une œuvre complexe et donc un parcours à l’exposition déroutant parfois : cela même s’il est accompagné de correspondances, revues, photographies de ces sources d’inspiration.
Entre art brut et modernité (rappelons que PAUL KLEE fut enseignant au Bahaus de Weimar, puis Dessau, proche de Kandinsky), peinture et musique lui-même excellent violoniste, entre figuration et abstraction, rêve et réalité, tentons avec PAUL KLEE d’oublier, s’alléger, se laisser porter, emporter en ses mondes, Entre Mondes.
A remarquer que cette exposition est réalisée avec le concours du Zentrum Paul Klee de Berne qui lui-même présente « PAUL KLEE, les êtres humains entre eux », jusqu’au 22 mai 2022.
C’est ici une étude (dessins pour l’essentiel) sur la cohabitation des êtres humains, mais non sans une certaine distance ironique.
Feu d’ironie, réelle conviction et magistrale illustration nous seront offertes à l’exposition « ECRIRE, C’EST DESSINER » au CENTRE POMPIDOU METZ, encore jusqu’au 21 février 2022 !
C’est là le vibrant crédo que la poétesse-artiste ETEL ADNAN (1925-2021, d’origine libanaise, père syrien, mère grecque… et de nationalité américaine) et ses porellos, longs, merveilleux livres accordéons peints-inscrits, illustrant cet éternel dialogue ainsi que cette non moins éternelle aspiration, nécessité à communiquer savoirs, croyances, émotions de tous ordres, en tous lieux, toutes époques. Ce sera pour nous l’émotion de (re)découvrir un fragment du Livre des morts égyptien sur papyrus, un ouvrage enluminé du XIVe siècle, un rare croquis d’Arthur Rimbaud, une encre de Marguerite Yourcenar, les idéogrammes d’Henri Michaux, un manuscrit illustre ottoman, les œuvres écrites – dessinées de Cy Twonbly, Pierre Alechinsky, Louise Bourgeois, Pierrette Bloch…
Narration universelle « Poésie du tout-monde », exprime Pélagie Gbaguidi, artiste africaine née en 1965, inspirée par la vie et l’œuvre d’ETEL ADNAN et invitée à réaliser une fresque éphémère
mêlant histoire contemporaine et récits traditionnels.
Sur votre route, Evian-les-Bains, peut-être :
« CHRISTIAN BÉRARD, au théâtre de la vie », Palais Lumière, du 5 février au 22 mai 2022.
Peinture, théâtre, scénographie, danse, décoration, illustration, CHRISTIAN BÉRARD (1902-1942) a prêté son talent à nombre créateurs de son époque. A l’académie Ranson qu’il fréquente au début des années 20, il se marquera de l’influence « Nabi » d’Edouard Vuillard et Maurice Denis. Ces mêmes années il rencontre Christian Dior qui lui ouvre les portes de la mode. Son travail d’illustrateur inspirera Elsa Schiaparelli et également Yves Saint Laurent qui dira : « à l’âge de 13ans, c’était à Oran où je suis né, j’ai assisté à une représentation de « L’école des femmes » avec Louis Jouvet. Les décors étaient de CHRISTIAN BÉRARD, un artiste prodigieux. Ce fut pour moi un très grand choc ». C’est au théâtre en effet que CHRISTIAN BÉRARD réalise ses plus belles, plus emblématiques œuvres, dont des décors et/ou costumes pour des mises en scène de Louis
Jouvet, Jean Cocteau (ex La belle et la bête en 1945), Jean Giraudoux (La Folle de Chaillot 1945), Jean Genet (Les Bonnes en 1947) … Cette rétrospective rend donc hommage à ce talent multiple, coloré, que Louis Jouvet décrivait comme « un arc en ciel qui déambule ». Mort brutalement en 1949, Francis Poulenc composera son Stabat Mater à sa mémoire et Jean Cocteau lui dédiera son film « Orphée » (1950).
Et pour terminer : Tous à Rio ! … à Moulins, où le Centre National du Costume de Scène présente jusqu’au 30 avril 2022, « CARNAVAL DE RIO » (NB : carnaval à Rio reporté « pour cause que l’on sait » en avril). A Moulins, ce ne sont que costumes colorés, plumes paillettes, masques, maquillages fantastiques… au rythme de la samba, bien sûr !
En tous domaines, et comme le suggérait YVES SAINT LAURENT, je souhaite, je vous souhaite que l’art soit, en cette année et d’autres à venir, toujours, ‘fabricant de bonheur ».
Christine Leduc
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17/11/2021
Bien sûr, comment ne pas parler, reparler une fois encore, de l’exposition /
« LA COLLECTION MOROZOV. Icônes de l’Art Moderne » à la Fondation Vuitton, jusqu’au 22 février 2022.
Exposition qui devrait illuminer cette rentrée, les jours plus sombres espérons-le passés.
Imaginez, voyez, rêvez, dans la lumière de la Méditerranée de Bonnard, le Maroc de Matisse, les couleurs éclatantes de la Polynésie de Gauguin, le magistral décor de Maurice Denis pour le salon de musique d’Ivan Morozov (qui reprendra le flambeau de la collection à la mort de son frère Mikhaïl en 1902), 13 panneaux sur le thème de Psyché réunis et redisposés pour cette occasion. Et puis tous ces noms merveilleux, ces œuvres tout autant, de Monet, Renoir, Van Gogh, Rodin, Camille Claudel, Manet, Pissarro, Derain, Vlaminck, Cézanne (la grande passion d’Ivan Morozov), Picasso… sans oublier les peintres également « modernes » russes : Vroubel, Larionov, Gontcharova…
Bien sûr, l’exposition de la collection Morozov étincellera, mais d’autres étoiles brilleront aussi ce mois à venir, déjouant les jours déclinant.
Plus profondément dans l’âme russe, s’illustrera :
ILYA REPINE (1844-1930), Petit Palais à Paris, jusqu’au 23 janvier 2022.
Artiste majeur de la fin du XIXe, début XXe siècle en Russie, il sera le témoin attentif des bouleversements historiques de son pays à cette époque.
Sa peinture réaliste, à la touche vibrante, célèbrera le peuple russe dans de vastes et puissantes mises en scène (telle « Les Cosaques), comme dans de plus intimes compositions, révélant là ses expérimentations sur la lumière, les couleurs (influencé qu’il fût lors de ses séjours en France par les impressionnistes, par Manet…) ou encore dans ses portraits, tels ceux de ses contemporains : Tourgueniev, Tolstoï, Moussorgski…
L’originalité et la qualité de la programmation du Petit Palais se poursuit avec JEAN-MICHEL OTHONIEL, le théorème de Narcisse, jusqu’au 2 janvier 2022.
L’artiste y investit musée et jardin de briques en verre de couleurs, dont « Rivière Bleue », accueillant le visiteur, de verre miroité, d’inox poli, se jouant dans son univers fantastique, de troublants jeux de reflets… d’où le nom de l’exposition !
Autre univers troublant, et bien plus encore, celui de GEORGIA O’KEEFFE (1887-1986), Centre Pompidou, jusqu’au 6 décembre 2021.
Figure singulière, libre (tout en ayant été la muse et compagne du photographe-galeriste Alfred Stieglitz), déterminée, arpentant le sol américain d’est en ouest, elle développera un art tout aussi singulier entre abstraction et figuration : photographiques et macroscopiques cadrages de fleurs envoûtantes, sensuelles ; vues vertigineuses, graphiques de gratte-ciels new-yorkais, aux paysages brûlants, arides du Nouveau Mexique, là où elle s’établit dès 1946. Sur sa terre d’élection, elle déclinera alors des compositions dépouillées, oscillant entre réalisme et surréalisme, y mêlant minéral, végétal, animal… glanant en effet au cours de longues randonnées, pierres, os, crânes d’animaux.
« je sais que je ne peux pas peindre une fleur, je ne peux pas peindre le soleil sur le désert. Mais je peux peut-être, grâce à la couleur, vous faire part de mon expérience de la fleur, du désert, de ce qu’ils signifient pour moi à ce moment précis. »
Restons en Amérique avec l’œuvre photographique de VIVIAN MAIER (1926-2009), Musée du Luxembourg jusqu’au 16 janvier 2022.
Derrière la charmante image de la Nanny, gouvernante un temps pour enfants à New-York et Chicago, et de photographe amateur, se profile une femme seule, à problèmes psychiques, terminant sa vie dans la misère, ses meubles, photographies comprises, saisis pour loyers impayés. Le hasard, après sa mort, de leurs découvertes, révèle, au travers de milliers de clichés et négatifs non développés, un œil génial à cadrer, à saisir les ombres, les reflets, un geste, un regard saisis dans les rues de New-York ou Chicago, mais aussi un œil implacable malicieux parfois dans l’analyse de la société américaine d’après-guerre, ses mutations (soit d’environ 1950 à 1980), tant au niveau de questions politiques, sociales (monde du travail, ségrégation…), que de l’univers des théâtres, des cinémas, des musées aussi !
Où l’on retrouve ALFRED STIEGLITZ avec « Chefs d’œuvres photographiques du Moma, la collection Thomas Walther », Jeu de Paume – Paris, jusqu’au 13 février 2022.
En effet, Alfred Stieglitz (1864-1946), représenté à l’exposition, fût par ailleurs un important contributeur à la reconnaissance de la photographie en tant que forme d’art. Là nous est présenté un éblouissant florilège de toutes les avant-gardes européennes et américaines ; de Dada au Bauhaus, du surréalisme au constructivisme, à la Straight Photography (« Photographie pure », soit saisir son sujet de façon aussi réaliste, objective que possible : Berenice Abbott, Paul Strand…). Photographes connus, d’autres moins, forment cette fascinante histoire : l’avènement de la modernité en photographie.
Quelques noms : Raoul Haussmann, Brassaï, El Lissitzky, André Kertesz, Maurice Tabard, Paul Strand, Manuel Alvarez Bravo, Claude Cahun…
De la couleur… avec SIGNAC Collectionneur » musée d’Orsay jusqu’au 13 février.
Voilà une originale manière d’aborder ce thème au travers des choix de celui-là même « chantre de la couleur » : Paul Signac (1863-1935). Artiste, nous le savions, Collectionneur, nous le découvrons. Signac sera également très actif, parfois menant combats, sur la scène artistique en tant que fondateur (avec Georges Seurat), puis président du Salon des Indépendants. Que trouve-t-on sur ses murs ? (Collection aujourd’hui dispersée et qui a compté jusqu’à 250 œuvres) : des toiles de ses amis néo-impressionnistes (Georges Seurat, Maximilien Luce, Henri-Edmond Cross…), Renoir, Monet, Jonkind, des Nabis (Bonnard, Vuillard, Valloton…). Et aussi des Fauves (Kees Van Dongen, Matisse, Valtat…). Et au milieu de leurs couleurs « rugissantes », un magnifique fusain d’Odilon Redon !
Haussons le ton, la forme, SOUTINE / DE KOONING, la peinture incarnée, musée de l’Orangerie, jusqu’au 10 janvier 2022.
Un face à face comme une évidence, une résonnance entre deux artistes « expressionnistes », l’un figuratif, l’autre abstrait : Chaïm Soutine (1893-1943) et Willem de Kooning (1904-1997). D’ailleurs ce dernier ne dira-t-il pas, ayant découvert Soutine dès les années 50 suite à une rétrospective au MOMA de New-York : « j’ai toujours été fou de Soutine ». S’établit alors ici, plus encore qu’un face à face, un corps à corps, dont les corps, les chairs (d’où le titre de l’exposition) de la célèbre série « Women » de Willem de Kooning. Palette violente, contrastée, stridente, matière projetée, empâtée, parfois fine – translucide, gestuelle vigoureuse, fiévreuse, lignes déformées, disloquées... Alors, qui de Chaïm Soutine ? qui de Willem de Kooning ? a vous ce réjouissant arbitrage !
Plus de calme, plus d’intériorité à présent : JAWLENSKY (1864-1941) : la Promesse du Visage, la Piscine – Roubaix (20 ans déjà…) du 6 novembre 2021 au 6 février 2022.
Artiste expressionniste ? fauve ? proche de Kandinsky et de l‘abstraction ? Alexeï Von Jawlensky fut tout cela, et Alexeï Von Jawlensky fut unique, privilégiant, explorant, recomposant inlassablement ce thème du visage (également présents à l’exposition des natures mortes, des paysages). Puisant aussi à la source du masque africain, asiatique, à la tradition russe (son pays d’origine) de l’art de l’icône, Jawlensky va, au fil du temps, cheminer vers plus de simplification, de stylisation voire de géométrisation proche alors de l’abstraction. Les vifs aplats colorés se déclinent jusqu’à devenir plus légers, subtils, délicats. « Promesse de visage » donc, Promesse, au-delà de toutes individualité, d’une vive et lumineuse intériorité quasi mystique. Dans ce parcours, sont également présentés des toiles d’artistes auxquels Jawlensky fût très liés, tels Kandinsky bien sûr, Klee, Van Dongen, Matisse, Rouault…
« Ensemble, c’est tout », « sur la trame d’un amour » : les titres abondent pour présenter l’exposition ANNI ET JOSEF ALBERS, l’art et la vie, Musée d’art moderne de Paris, jusqu’au 9 janvier 2022.
Peut-être retient-on surtout, de Josef et de sa mythique série « Hommage to the square » : série de carrés superposés, apothéose de ses recherches sur l’interaction des couleurs. Mais Anni (1899-1994) et Josef (1888-1976) étaient animés d’une même vision, d’une même conviction sur l’indispensable rôle de l’art au développement de l’être et de la société. C’est au sein du Bauhaus, en tant qu’élèves puis enseignants qu’ils poursuivent leurs travaux ; Josef sur la théorie des matériaux d’abord, conjointement à de la peinture abstraite géométrique (dont sur verre) et Anni parallèlement à ces recherches, en version textile. Ainsi donc à chacun sa voie, mais tous deux adeptes du précepte de l’historien d’art Wilhelm Worringer pour qui « la ligne géométrique procure du bonheur à l’homme troublé par l’obscurité et l’enchevêtrement des phénomènes ». Ces idéaux, cette énergie seront fauchés par la montée du nazisme qui contraint, en 1933, le couple à quitter l’Allemagne pour les Etats-Unis. Plus largement, en Amérique, ils découvriront de nouvelles sources d’inspiration : arts populaires, arts précolombiens au Pérou, Mexique… Ces motifs viendront nourrir les fameux « Hommages au carré » de Joseph, tout comme les œuvres textiles d’Anni, mais aussi gravures, sérigraphies qu’elle expérimente ensuite.
Ainsi sont donc présentés à l’exposition toiles, dessins, gravures, tissages mais aussi meubles, bijoux : vibrant écho à ce couple « Anni et Josef, l’art et la vie ».
Mais que serait une Newsletter sans la main de PABLO PICASSO ?? (Présent déjà toutefois dans la collection Morozov !)
« PICASSO, l’étranger », musée national de l’immigration, jusqu’au 13 février 2022.
Le parcours, essentiellement graphique, se lit comme une enquête sur la tardive reconnaissance de l’artiste en France.
« LES LOUVRE DE PICASSO », musée du Louvre-Lens, jusqu’au 31 janvier 2022.
Eclairant les liens de Picasso aux Maîtres du passé en général et au musée du Louvre tout particulièrement.
J’aimerais terminer par ce bel hommage présenté à l’Institut du monde arabe, jusqu’au 2 janvier 2022, « LUMIERES DU LIBAN, art moderne et contemporain de 1950 à aujourd’hui ».
55 artistes libanais sélectionnés y célèbrent, malgré les malheurs qui frappent leur pays entre guerres civiles et explosion du port de Beyrouth, la toujours vitalité créatrice libanaise.
De la Russie au Liban, des Etats-Unis à la France, à l’Europe, que de nombreuses étoiles brillent en cette fin d’année !
Christine Leduc
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09/06/2021
En ce printemps-été 2021, accordons-nous enfin quelques : - belles échappées -
Sur ces routes, de nombreuses, si nombreuses haltes nous accueillent (expositions, musées, festivals…), que le choix s’avère difficile : heureux tourments !
Hors la très médiatique collection de François Pinault à la Bourse du Commerce de Paris (dont nous avions précédemment parlé – ouverture prévue le 22 mai). Non moins attendue se dévoile :
« LA COLLECTION DE MARTINE ET LEON CLIGMAN » à l’abbaye royale de Fontevraud.
Sur ces murs millénaires, dans les anciennes écuries des mères abbesses, prennent place quelques 900 œuvres des XIXe et XXe siècles, fruits de leur passion : Toulouse Lautrec, Degas, De Vlaminck, Marquet, Van Dongen, Delaunay, Gris, Derain, Marinot… Rodin, Richier, Martine Martine (devrais-je préciser que Martine Cligman, artiste sous le nom de Martine Martine, est la fille de Pierre et Denise Lévy ?). Ce parcours est ponctué d’œuvres extra-occidentales tissant ainsi un fil conducteur tant formel que chromatique.
A noter que la scénographie fut réalisée par la talentueuse designer contemporaine : Constance Guisset.
Arles et sa déjà fameuse Tour Luma. Il s’agit en fait de tout un complexe abritant la FONDATION LUMA, que destine sa présidente, Maja Hoffmann, à de multiples fonctions culturelles, avec, entre autres, lieu d’exposition, de création sur des thématiques telles l’environnement, les droits humains, l’éducation (assortis d’ateliers pédagogiques).
L’audacieuse architecture signée Franck Gehry, avec ses 11.000 panneaux métalliques étincelants (écho aux Alpilles toutes proches ou, se prend-on à rêver, à la nuit étoilée de Van Gogh) se veut traduire toute l’ambition, toute la diversité du projet (ouverture prévue le 26 juin).
Retour au couvent avec un lieu désormais ouvert sur la ville et le XXIe siècle : Les Franciscaines à Deauville. Au sein d’un vaste ensemble, dont on peut admirer la réhabilitation, se tiennent à différentes étages, auditorium, médiathèque, espace multimédia, musée consacré à André Hambourg et à la Normandie vue par Corot, Courbet, Vuillard, espaces d’exposition, dont de photos (Peter Lindbergh - Sarah Moon…). Non sans humour, l’exposition inaugurale s’intitule « SUR LES CHEMINS DU PARADIS ». Plus qu’un programme, une promesse ! Le « chemin » se parcourt en compagnie d’artistes de tous lieux, tous temps : Brueghel de Velours, Maurice Denis, Marc Chagall, Imran Qureshi (artiste pakistanais contemporain) … , de textes tel la Divine Comédie de Dante, de documents, notamment sur les jardins islamiques, témoignant de la prégnance et permanence du thème. A noter de prestigieux prêteurs comme les musées, du Louvre, d’Orsay, de l’Aga Khan ; ainsi que de prestigieux contributeurs comme la rabbin Delphine Horvilleur ou Régis Debray.
Tout près de là, permettons-nous une escapade à la « Villa du Temps retrouvé ». Où Cabourg devient Balbec sous la plume de Marcel Proust, toile de fond à son œuvre « A la recherche du temps perdu ». La villa, emblématique de l’architecture « Belle Epoque » propose alors une immersion dans l’univers de l’écrivain tant littéraire que picturale (Jacques-Emile Blanche, Eugène Boudin, Claude Monet…), musicale avec Claude Debussy et olfactive semble-t-il (la petite madeleine peut-être ?) A noter : la reconstitution d’une chambre Marcel Proust au musée Carnavalet, musée tout récemment rouvert après 4 ans de rénovation !!
Autres univers immersifs :
Aux Bassins de Lumières de Bordeaux : « MONET, RENOIR… CHAGALL, VOYAGES EN MEDITERRANEE » jusqu’en janvier 2022. Des œuvres de ces artistes (mais aussi de Picasso, Signac, Derain, Vlaminck, Dufy…) projetées sous forme numérique, nous plongent sur ces rives méditerranées.
Paul Signac est par ailleurs le cœur d’une exposition (œuvres « réelles » cette fois, issues d’une collection particulière) au musée Jacquemart-André, jusqu’au 19 juillet : « SIGNAC, LES HARMONIES COLOREES », accompagné d’autres peintres néo-impressionnistes tels Camille Pissaro, Théo Van Rysselberghe, Henri-Edmond Cross, Maximilien Luce.
Après les Bassins de Lumières de Bordeaux, les CARRIERES DE LUMIERES DES BAUX DE PROVENCE, carrières qui émerveillèrent tant Jean Cocteau, qu’en 1959, elles furent le lieu de tournage de son film « Le testament d’Orphée » avec notamment Jean Marais. Actuellement et jusqu’en janvier 2022, y sont projetés, en numérique ici : « CEZANNE, MAITRE DE LA PROVENCE » et « VASSILY KANDINSKY, L’ODYSSEE DE L’ABSTRACTION ».
Restons au sud, en Avignon.
Sous le commissariat d’Henri Loyrette, l’artiste peintre d’origine chinoise Yan Pei-ming déploie ses œuvres monumentales dans la Grande Chapelle du Palais des Papes, jusqu’au 31 janvier 2022, avec pour intitulé « TIGRES ET VAUTOURS ». Il a dit-il, pour ambition, d’éprouver « toute la dramaturgie de l’histoire complexe de la présence des papes en Avignon au Moyen-Age » et qui, poursuit-il, « devraient résonner avec le monde tel que nous le vivons aujourd’hui ».
De ses toiles seront également présentées à l’Hôtel de Montfaucon (Collection Lambert) à Avignon.
A Aix en Provence, hôtel de Caumont, Centre d’Art, « ZAO WOO-KI – IL NE FAIT JAMAIS NUIT » jusqu’au 10 octobre 2021. Quelques 80 œuvres de 1935 à 2009 (ZAO WOO-KI, né 1920, arrive à Paris en 1948, décède en 2013), huiles sur toiles, aquarelles, encres de chine sur papier, témoignent de la quête de l’artiste à inventer de nouveaux espaces animés par la lumière, construits par des jeux de masses colorées s’affrontant ou fusionnant ; et cela sous le regard de maîtres tels que Paul Klee ou bien sûr Paul Cézanne auquel ZAO WOO-KI rendra de nombreux hommages picturaux.
Plus au Nord, au Centre Pompidou de Metz, « FACE A ARCIMBOLDO » jusqu’au 22 novembre. L’exposition propose un réjouissant dialogue entre donc Giuseppe ARCIMBOLDO, peintre adoré au XVIe siècle puis longtemps déconsidéré par les historiens de l’art, et des artistes à un moment de leur carrière influencés (influences assumées, inconscientes ou fantasmées ?) par son imaginaire foisonnant tout de fruits, légumes, animaux. Parmi eux, on compte Magritte, Picasso, Bacon, comme Annette Messager, Cindy Sherman, ou les frères Campana (« ébouriffants » designers brésiliens).
Terminons par Paris.
Outre des expositions que nous avions précédemment évoquées (comme au Centre Pompidou et jusqu’au 23 aout : « ELLES FONT L’ABSTRACTION – UNE AUTRE HISTOIRE DE L’ABSTRACTION AU XXe siècle » ou : « PICASSO (1881-1973) – RODIN (1840-1917) », Musée Rodin jusqu’au 2 janvier 2022.
Le charme du petit Musée de Montmartre avec « LE PARIS DE DUFY » jusqu’en septembre.
Mais à Paris, ou partout ailleurs
Où que vous soyez
Quoique vous regardiez, écoutiez,
Je vous souhaite de très - belles échappées -
Christine Leduc
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25/03/2020
« Un poète doit laisser des traces de son passage, non des preuves. Seules les traces font rêver ». René Char.
Pourrait-on ainsi le dire de toutes les formes d’art, riches quant à elles, de matières, de formes, de couleurs ?
Laissons-nous donc porter, au-delà des craintes et des incertitudes de notre époque, par quelques propositions de ces rêves d’artistes. Propositions fort nombreuses en cette rentrée, en cause de reconductions, de prolongations, mais aussi de passionnantes nouvelles expositions.
Et couleurs en majesté (en antidote ?) avec MATISSE COMME UN ROMAN – Centre Pompidou – du 21 octobre 2020 au 22 février 2021
Comme pour Francis Bacon, le Centre Pompidou retisse ce riche dialogue : images et mots. Quelques 230 œuvres de ce magicien des couleurs… et des formes (pensons à ses papiers gouachés, découpés notamment) s’accordant sous la plume, la voix d’écrivains, critiques, poètes tels Clément Greenberg, Pierre Schneider, Mallarmé dont il illustra des poèmes… et Aragon, son ami, rejouant ici du titre de son ouvrage : « Henri Matisse, roman ».
Envoûtement des images, poésie des mots ou poésie des images et envoûtement des mots, à chacun de rêver.
De rêver jusqu’au ciel peut-être ? YVES KLEIN ET SES CONTEMPORAINS – Centre Pompidou de Metz, (fêtant ses 10 ans), jusqu’au 1er février 2021.
Au-delà de son iconique Bleu (IKB), nous y découvrons audaces, performances, influences (Fontana, Burri, mouvement Gütai…) et couleurs au pluriel, de celui qui aspirait à :
« signer au dos du ciel » (Yves Klein)
« repousser sans cesse les limites de l’art, et faire du monde entier un espace sensible permettant à l’humain de se reconnecter à l’univers » commente Emma Lavigne, commissaire de l’exposition. Merveilleux projet écologique !
« Le soleil inonde ma toile » annonce un tableau de GERARD FROMANGER – Musée des Beaux-Arts de Caen jusqu’au 3 janvier 2021.
Heureuse prolongation qui nous fait (re)découvrir cet artiste (né en 1939), tenant du mouvement « Figuration narrative », conjuguant abstraction et figuration. Sont ainsi révélés le pouvoir, subjectif de la couleur et le pouvoir objectif d’un monde bien présent, vivant, voire contestant, de la rue.
De cette même « Figuration narrative », JACQUES MONORY (1924-2018) – Fondation Maeght jusqu’au 22 novembre 2020. On s’immerge dans un bleu (… mais pas que ! là encore) habillant un imaginaire très cinématographique, souvent proche d’ailleurs d’un film « Noir » américain.
Soleil et Noir associés, précisément, au Louvre Lens : SOLEILS NOIRS jusqu’au 25 janvier 2021. Se référant à l’exposition historique « le Noir est une couleur » à la Galerie Maeght en 1946, ainsi qu’au passé minier de la région Nord, l’exposition en exploite toute la puissance, de l’Antiquité à nos jours. Le Noir se décline tour à tour inquiétant, austère, chez les Régents du Nord au XVIIe siècle, poétique, mystérieux (Redon), avant-gardiste (Malevitch, Kandinsky), « dépassé » (avec l’outre-noir de Pierre Soulages) … « stylé » avec la « petite robe noire » de Jeanne Lanvin. Fascinante couleur, fascinante plongée.
Associé au blanc, le noir se fait photographique. NOIR ET BLANC : une esthétique de la photographie – Grand Palais du 12 novembre 2020 au 4 janvier 2021. 300 emblématiques tirages, XXe siècle, de la BNF, démontrent, si nécessaire, toutes les possibilités (thème, cadrage, lumière), les infinies subtilités de cet art, dans l’œil (mais quel œil !) de Brassaï, Robert Doisneau, Diane Arbus, Helmut Newton, Mario Giacometti, André Kertesz… bien d’autres à découvrir.
Comment alors ne pas évoquer Man Ray (d’ailleurs présent à l’exposition ci-dessus) au Musée du Luxembourg - MAN RAY ET LA MODE jusqu’au 3 janvier 2021. Ses solarisations, surimpressions, collages, son génie se prêtent ici, avec grâce, au monde de la mode (Poiret, Chanel…) et de la publicité avec les revues telles Vogue, Harper’s Bazaar, Vanity Fair.
Mode et photographie et plus, là également avec SARAH MOON (née en 1941), « Passé Présent » au MAM de Paris jusqu’au 10 janvier 2021. Certains se souviendront peut-être de ses campagnes publicitaires pour la marque Cacharel d’une douce et mélancolique poésie. Mais Sarah Moon, par ailleurs, ex-mannequin Haute-Couture, et libérée des contraintes d’un studio, développera une pratique toute personnelle. Elle nous convie aujourd’hui à une « ballade » (selon son terme), sensible dans un univers, des univers, magnétiques, oniriques, étranges, angoissants parfois, tels sont les rêves aussi !
JOSEF KOUDELKA, quant à lui, avec « Ruines » à la Bibliothèque nationale de France jusqu’au 16 décembre 2020, nous transporte de ses tirages panoramiques (sa signature) au-delà du temps et des civilisations, sur les rives de la Méditerranée. Liant tragique et sublime, il trouvera là « ce qui m’est désormais le plus précieux, le mariage de la beauté et de temps ».
Et pour terminer notre panorama photographique, faisons escale à la Fondation Vuitton, avec CINDY SHERMAN jusqu’au 3 janvier 2021. S’y dévoilent de troublants autoportraits, comme autant de métamorphoses (« Rombière », dandy, madone…) questionnant, non sans humour voire autodérision, notre rapport à l’image, aux apparences sociales, aux archétypes. Le regard acéré de Cindy Sherman se prolonge par une sélection d’œuvres choisies au sein de la collection de la Fondation Vuitton.
Où l’on aborde, derrière l’image toujours, mais certes bien différemment, le vaste domaine de l’inconscient : LEON SPILLIAERT (1881-1946) - « Lumière et Solitude » – Musée d’Orsay du 13 octobre 2020 au 10 janvier 2021. Paysages nocturnes, intérieurs désertés, figures fantomatiques, visages-masques ou hagards, hantent l’artiste. Le rêve, évoqué par René Char, se teinte alors d’angoisse voire de cauchemar, au fil d’une palette sombre trouée de fulgurantes lumières.
« Je suis le rêve, je suis l’inspiration » – VICTOR BRAUNER (1903-1966). Importante et bienvenue rétrospective au MAM de Paris jusqu’au 10 janvier 2021. Une inspiration que cet artiste puisera à de multiples sources. C’est une vie d’abord marquée par ses origines roumaines, par la pauvreté (travaillera à une période avec de la bougie fondue, des cailloux, de la ficelle…), par l’antisémitisme, l’exode, mais aussi par ses rencontres au sein du mouvement surréaliste. Et c’est aussi une inspiration nourrie d’une « mythologie » toute personnelle mêlant spiritisme, tarots, kabbale, hiéroglyphes égyptiens, mythes océaniens, mexicains, contes pour enfants…
Au regardeur de faire le tableau (« ce sont les regardeurs qui font le tableau », selon Marcel Duchamp).
Une figure qui inspira, un temps, les Surréalistes : GIORGIO DE CHIRICO – « La peinture métaphysique » – Musée de l’orangerie jusqu’au 14 décembre 2020. Tout empreint de la philosophie de Nietzsche, de culture antique, Giorgio de Chirico crée (avant un « retour à l’ordre » de source résolument classique) une œuvre silencieuse, interrogative, singulière, révélée par Guillaume Apollinaire en 1913. Pour exemple, ses emblématiques ombres ou « perspective métaphysique, géométrie de l’absurde où les ombres ne coïncident pas avec la théorie des ombres » dira-t-il. Mannequins, éléments insolites porteront plus loin encore dans l’inconscient.
Autre porte ouverte sur son exploration « HYPNOSE » - Musée des Beaux-Arts de Nantes du 15 octobre 2020 au 31 janvier 2021. Sont présentés les liens entre Science, Etudes (du XVIIIe siècle à nos jours avec la place dominante, « fascinante » des écrans) et création. Se croisent ainsi Courbet et Charcot, Freud et Rodin, les surréalistes bien sûr et leurs séances d’hypnose collective, l’art optique, le cinéma de Fritz Lang et son film « Dr Mabuse » (1922 – préfigurant les manipulations des régimes totalitaires). Jusqu’à une vaste installation multimédia de l’artiste contemporain Tony Oursler.
IPOUSTEGUY (1920-2006), ce nom vous est-il connu ? Sculpteur farouchement indépendant, hors des courants du XXe siècle, il abordera les thèmes universels propres à l’Homme avec une grande force expressive. Se révélant puissant, bouleversant, dérangeant parfois, il est présent dans le monde entier de Tokyo, Melbourne à Berlin ; beaucoup dans des espaces publics mais aussi dans de prestigieux musées tels que le Moma, le Guggenheim de New York, le Centre Pompidou à Paris, … et le musée d’Art moderne de Troyes ! 5 expositions lui sont, à ce jour, consacrées, en Meuse où il naquit il y a 100 ans et vécut longtemps, soit Doulcon, Bar le duc, Verdun, et un peu plus loin à Charleville-Mézières et Epinal.
Et pour terminer, musique ! Gitanes, ballerines, arlequins à la guitare, faunes à la flûte de pan… ont accompagné, imprégné l’œuvre de Picasso. Alors avec « les Musiques de Picasso » - Philharmonie de Paris jusqu’au 3 janvier 2021. Laissons-nous emporter en rêve, en rythme, sur les ailes de l’Art…
Christine Leduc
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